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Sibelle, la chasse au moustique tigre et la mode des cols roulés 


Chaque samedi, l’actualité lotoise vue par Philippe Mellet et surtout par ses chats. 

Ils nous auront gâché en partie notre été. Déjà que la canicule fut trop souvent asphyxiante, le sécheresse déshydratante, les quelques moments où nous pûmes profiter du bolet ou du jardinet, ils nous attaquèrent sans relâche, en escadrille, et nos ustensiles préventifs s’avérèrent le plus souvent sinon efficaces, tout du moins insuffisants pour contrarier pleinement leur soif de sang : les moustiques, tigres ou pas tigres, nous piquaient les bras, les jambes, et même les orteils quand nous hésitions à enfiler des chaussettes jugées peu compatibles avec les tongs. Les bougies ou spirales parfumées à la citronnelle titillaient bien nos narines, mais les moustiques paraissaient insensibles ou trop nombreux.

C’est donc avec soulagement que nous apprenons avec ma protégée féline que le maire de Cahors a rendu public en début de semaine un plan de bataille, a décrété devrais-je dire la mobilisation générale pour lutter contre le moustique tigre, qui « évolue essentiellement en ville où il colonise toutes sortes de milieux dont les jardins et les espaces publics qui regorgent de petits endroits d’eau stagnante », selon les dires des techniciens qui accompagnaient le premier magistrat. Mais a priori, dans notre village aussi, il était à son aise… Et Sibelle remarque par ailleurs : « Sans compter que cet indésirable peut aussi transmettre des maladies. Ce monde est assez dingue pour qu’en plus, on ne soit pas touché par la dengue… » Ma tigresse domestique pique aussi. Mais seulement mes (mauvais) jeux de mots. 

Sur ce, une autre chasse est ouverte. Ces derniers jours, ce n’est pas le son des cors ou des trompes qui résonné à travers le poste de télé (ou sur les réseaux sociaux), c’est celui du starter donnant le coup d‘envoi d’une course à l’échalote d’un nouveau genre : comment économiser l’énergie ? Nos ministres et dirigeants de la majorité jouent des coudes – et de l’imagination – pour figurer dans le tiercé de tête. Le ministre de l’Economie Bruno Le Maire a suggéré le port du pull à col roulé, la Première ministre Elisabeth Borne s’est présentée devant la presse vêtue d’une sorte de polaire et le pompon, pour l’heure, est revenu à Gilles Le Gendre : le député macroniste de Paris a déclaré sans rire délaisser le sèche-linge électrique pour étendre ses lessives sur de bons vieux Tancarville. Soit.

« Et pour repasser ses chemises, il va faire comment ? Ressortir les fers d’antan rougis au feu ? » questionne Sibelle, qui songe à ce vieux sketch de Coluche… « Dites moi ce dont vous avez besoin, je vous expliquerai comment vous en passer… »

Car sans sombrer dans je ne sais quelle démagogie, qui peut croire que nos élites s’occupent en personne de ces choses-là ? Penser à appeler l’artisan pour l’entretien de la chaudière, purger les radiateurs, vérifier au jour le jour où en est le compteur de gaz ou d’électricité ? Quant au député Le Gendre, est-ce qu’on peut imaginer un instant qu’entre deux séances dans l’hémicycle ou deux inaugurations de chrysanthèmes, il court en personne sortir le linge pour l’étendre sur le séchoir positionné à dessein derrière la fenêtre que le soleil d’hiver vient mollement réchauffer (quand il ne pleut pas). 

Eux, ils ne vont pas s’économiser ce week-end : ce sont les bénévoles mobilisés par l’association des « 1000 mains du Lot » qui vont nettoyer, restaurer, entretenir les dizaines de km que parcourt dans notre département le chemin de Saint-Jacques. Ou plutôt les chemins, car il y a des variantes. Avec ma protégée, si nous cantonnons nos balades aux environs du village et des vignes proches, nous savons bien toutefois qu’un chemin, ce n’est pas seulement un cheminement. C’est-à-dire qu’il ne faut pas seulement que l’itinéraire soit balisé, encore faut-il que l’environnement soit entretenu et un tantinet plaisant : des murets de pierre sèche, un abri de berger, un bosquet… Autant de repères, autant d’éléments de petit patrimoine qui rythment la marche du pèlerin ou du randonneur. Et quand le chemin traverse les abords d’un village, pareil. C’est également un enjeu économique. Non seulement ceux qui empruntent le chemin, ne serait-ce que quelques km, doivent manger et dormir, mais il y a aussi les services annexes et les activités sous-jacentes. Il y a quelque temps, un reportage à la télé avait présenté une propriétaire de chambres d’hôtes, dans l’Aveyron voisin, établie sur l’itinéraire du chemin de Saint-Jacques : elle avait suivi une formation en réflexologie plantaire pour proposer à ses clients marcheurs, en supplément, de les soulager en massant avec précision leur moyen de locomotion. C’est-à-dire leurs pieds. Sensible des coussinets, Sibelle se surprend à rêver : « Maintenant, tu sais ce que tu répondras au prochain malandrin qui téléphonera pour savoir si tu souhaite utiliser l’argent qui dort sur ton compte individuel de formation ! » 

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