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Elom 20ce à Africajarc : « Mon travail repose sur l’intime, le spirituel et l’activisme »


Entretien avec l’artiste au rendez-vous du festival 2024 ce samedi. 

Originaire du Togo, Elom 20ce est un artiste complet : à la fois poète, rappeur, performeur, cinéaste et designer. Ses textes militants qui conjuguent le rap au jazz et à la musique traditionnelle ont fait de lui un nom renommé de la scène rap africaine. Il a aussi collaboré avec des artistes comme Oxmo Puccino, Blitz the Ambassador, Le Bavar (La Rumeur) ou encore Rocé. Sur la scène d’Africajarc, où il sera samedi 20 juillet, il jouera en quartet avec un batteur, un saxophoniste et un bassiste.

> Medialot : on vous surnomme « le cogneur de l’invisible ». Pourquoi ?

Elom 20ce : dans un monde où on rêve de moins en moins, il revient aux artistes d’oser, d’inventer de nouvelles manières de faire, d’aider. Je pense que le monde va mal : les extrémismes montent, le système politique est de plus en plus fermé, en Afrique comme en Europe. Le monde a besoin de mieux, de se réinventer et ça passe par le rêve, par l’imaginaire, par inventer d’autres voies. C’est ce que j’essaie de faire humblement à travers mon art, en trouvant de nouvelles manières d’appréhender le monde, de s’exprimer. C’est ça cogner l’invisible, c’est appeler ce qu’on ne voit pas à l’œil nu.

> M. : vous êtes un artiste engagé, qui se présente comme un « arctivist panafrician », mais aujourd’hui il semble y avoir mille causes à défendre. Quelles sont celles dont vous parlez en priorité en tant que chanteur ?

E. 20ce : mon travail repose sur trois piliers : l’intime, le spirituel et l’activisme. Je ne réfléchis pas en termes de priorité mais en termes de transversalité avec une vision holistique de nos problèmes. « Amewuga », le titre d’un de mes albums, signifie « L’être humain a plus de valeur que les biens matériels ». C’est le vivant qui est au centre de mon travail, le respect du vivant. On peut réfléchir sur le plan de l’écologie, du respect des droits de l’homme, de la liberté d’expression, lutter contre la discrimination, contre le racisme, contre l’homophobie, etc., mais ce ne sont que les branches. L’arbre, c’est le vivant.  Il faut parler d’amour, pas seulement entre deux êtres, mais aussi pour soi-même. En tant qu’Africains, on a subi une histoire traversée de différents types de violence. Il y a un travail d’amour de soi à faire. Quand, à force de coups et de violence, on arrive à se déprécier, cela a des conséquences psychologiques sur des peuples entiers.

> M. : comment voyez-vous l’avenir de l’activisme ?

E. 20ce : tant que les hommes ne seront pas libres, tant qu’ils ne se sentiront pas à leur juste place, tant que les libertés seront de plus en plus enfermées, ils se battront.  Je pense que le militantisme a de beaux  jours devant lui car le monde va très mal. Les gens comprennent qu’ils ne peuvent plus être spectateurs et spectatrices et qu’ils doivent se retrousser les manches et mettre la main à la pâte.

> M. : dans vos chansons, vous maniez plusieurs langues. Ces mélanges se sont fait naturellement ? 

E. 20ce : je me considère aussi comme un chercheur de moi-même. Mon album « Amewuga » était au départ un travail de collecte de chansons traditionnelles auprès de vieilles dames du Togo. Je réfléchis en mina (langue véhiculaire au Togo), mais j’écris en français. Je peux aussi parler ou chanter en anglais ou en allemand. J’ai un héritage ancestral : la parole n’a jamais été neutre chez nous. C’est aussi à travers la musique qu’on éduque. Selon les sonorités, les thématiques, les personnes à qui je m’adresse, je passe d’une langue à l’autre. C’est organique.

 > M. : dans votre rap, on retrouve à la fois des influences jazz et des sonorités africaines traditionnelles. Comment définissez-vous votre style ?

E. 20ce : rythm & roots !

> M. : vous comptez à votre actif quatre albums et plusieurs collaborations de renom. Savez-vous déjà ce que vous réserve l’avenir ? 

E. 20ce : mon prochain album sort en septembre. C’est un conte poétique mis en musique qui s’appellera « Hors-temps ». J’avais écrit les textes pendant le confinement et on a enregistré l’album en une nuit avec un pianiste jazz. Juste tous les deux. Un autre album, plus rap cette fois, sortira en début d’année prochaine.

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