Ça travaille à Gindou pour les Rencontres Cinéma
La 38ème édition bat son plein jusqu’au 27 août 2022.
Des chiffres: 38ème édition, 80 films, 70 bénévoles, la salle de l’Arsenic pleine à ras bord, le Cinéma de Verdure qui déploie ses ailes sur le gazon, l’effervescence des grands jours. Voilà ce qui vous attend en arrivant au village de Gindou surpeuplé du 20 au 27 août de cette douce année 2022, un monde fou s’y rencontrant pour fêter les 38èmes Rencontres Cinéma. Au programme : « Viens je t’emmène tout droit jusqu’au matin. Voici venu le temps du soleil pour les gueux, ce vieux rêve qui bouge. L’inconnu du lac, le roi de l’évasion, les héros sont immortels. Pas de repos pour les braves, rester Vertical ».
Alain Guiraudie en est l’invité d’honneur, le régional de l’étape comme il se dit par ailleurs. Et cet incipit est la liste des titres de ses films. Une invite ? Une exhortation ? Une promesse ? Un grand vent de liberté qui souffle et vous emporte, en tout cas, vers l’ailleurs. Cette annonce attire les foules fatiguées de tant de restrictions variées qui se jettent dans son univers inclassable (trop long à détailler ici) avides comme un plongeur à la sortie d’une apnée.
Alain Guiraudie, c’est un immortel jeune homme qui vient vous expliquer simplement pourquoi et comment il en est arrivé à faire des films après être passé par le rêve d’écrire, pour y revenir ensuite. Un homme venu du terroir, avec son accent, son goût des hommes et du partage, son vieux rêve qui bouge, toujours et encore. Attentif à chercher l’ailleurs de la langue, de la pensée, de l’amour. Une langue simple, lumineuse, précise, des dialogues qu’on voudrait retenir, rien d’inutile, juste la nécessaire poésie . Et ça vous galope dans les rues, de préférence la nuit, ça vous tombe des arbres, ça envisage des choses que vous ne voyez plus… Comment oublier le gardien de nuit qui philosophe en coursant l’autre obsédé qui a décidé de peindre la ville en rouge ? (Tout droit jusqu’au matin) Et le dialogue des deux gars faisant un guet inutile en attendant… (Les Héros sont immortels) Il accompagne ses courts, moyens et longs métrages, en portant le propos vers son essentiel. Et de la plus belle des façons. Ce vieux rêve qui bouge, vous prend par la main, à la gorge, au cœur. Dans une usine désaffectée, restent quelques ouvriers désœuvrés. Un homme venu d’ailleurs arrive pour démonter la dernière machine. Cet homme est jeune et beau, il est le seul à travailler, il gêne. C’est dans le regard et les paroles que les choses vont se passer, réflexion sur le travail, son poids, le confort qu’il dispense malgré tout, la solidarité, les murs qu’on se construit et qui vous assèchent. Le bonheur au bout du couloir qu’on atteindra ou non… Le plus beau dialogue dit par une voix qui doute et qui vous suit longtemps. Rester vertical, garder son utopie. « Merci à ma maman », écrit Guiraudie à la fin de ses génériques loufoques. Grand choix de films et parmi eux : Cette dame de 90 ans , ethnologue qui ne s’arrêtera pas d’aider les réfugiés du Darfour, région sur laquelle elle a travaillé ( La Combattante) et l’hommage à Guy Cavaignac, un cher disparu.
Puis découverte de « Reprise en main » première fiction de Gilles Perret, sur le monde du travail, avec, en ce qui le concerne, un remerciement à son père, grand syndicaliste . Ici c’est la lutte contre le système du toujours plus d’argent pour les actionnaires, s’opposant au toujours moins de considération pour les ouvriers. Un défi que se jette un technicien par ailleurs alpiniste, de « voler » aux racheteurs d’une boîte qui marche le bénéfice d’une opération montée de toutes pièces. Et voilà une bande de copains qui prennent leur rêve pour la réalité et la réalité qui se laisse tenter au grand bonheur de tout le personnel et du public.
Alain Guiraudie rencontrera ses lecteurs à la librairie le 24 à 12 h 30 et présentera encore ses films jusqu’au 25. La vie continuera à cavalcader à Gindou du matin au soir jusqu’au dimanche matin 27 à pas d’heure. Qu’on se le dise !
Texte : Michele Solle
Photo Nelly Blaya