Sibelle, solidaire de la députée et fascinée par Henri Martin
Chaque samedi, l’actualité lotoise vue par Philippe Mellet et surtout par ses chats.
« La question est grave et ne tient pas du jeu de mots : est-ce notre société qui est toujours plus malade ou est-ce qu’il y a de plus en plus de malades dans notre société ? » Sibelle a le ton grave. Elle apprend comme moi avec consternation que la députée Huguette Tiegna a déposé plainte, menacée de mort pour la quatrième fois via un courriel, lequel contenait des formulations glaçantes. A la question de ma protégée féline, je réponds simplement : « Sans doute les deux… » Il n’y a donc pas d’exception lotoise. Au pays de Gambetta et de Monnerville, en 2022, certains n’ont pas compris. La démocratie, la grandeur de la république, c’est de pouvoir ne pas partager les options politiques d’un(e) élu(e), de le dire, de l’écrire, de le manifester, mais de toujours respecter et la fonction et bien sûr l’être humain.
Notre solidarité exprimée à l’adresse de Madame la Députée, voilà que ma tigresse domestique se sent pousser des ailes. Elle a sorti sur imprimante un tweet du préfet du Lot : « Vous avez le sens du contact, une capacité d’écoute et d’analyse, vous voulez vous engager pour le respect des droits ? Devenez délégué du Défenseur des droits dans le département ! » Sibelle entend apporter sa pierre à la cohésion de la nation. Elle s’estime à même d’écouter les doléances des uns et des autres relatives aux « droits des usagers des services publics, à la défense des droits des enfants, à la lutte contre les discriminations voire aux manquements à la déontologie de la sécurité », selon les explications auxquelles renvoie l’appel. Je fais remarquer à ma belle que si effectivement il n’est pas nécessaire d’avoir une formation juridique pour postuler, il convient toutefois de s’engager à tenir des permanences hebdomadaires (au moins une à deux demi-journées). Et ce, bénévolement. La précision adverbiale a son importance. J’observe que ma protégée accuse le coup. « Bon, je vais réfléchir. »
Il faut dire qu’entre-temps, un épique et fascinant ballet a débuté devant la fenêtre du séjour : ma fille a attaché au niveau du garde-corps un sachet de graines. Les mésanges réapparues d’on ne sait où depuis quelques jours ont immédiatement repéré ce filet garni. Et avec une fréquence métronomique, elles viennent à tour de rôle quérir leur quote-part alternant vol stationnaire et accrochage acrobatique. Ce trafic a évidemment le don d’énerver au plus haut point Sibelle, qui en oublie illico ce que seraient ses devoirs en tant que déléguée du Défenseur des droits. Visiblement, ceux des oiseaux et autres empêcheurs de ronronner en rond ne comptent guère. « J’y peux rien… C’est dans ma nature » soupire la féline.
Sans transition, concluons ce rendez-vous par la belle histoire de la semaine. On vous laisse juger s’il y a lieu d’espérer qu’elle ait valeur de parabole (laïque, bien sûr). Des particuliers ont fait don à la ville de Cahors et plus précisément au musée de plusieurs toiles d’Henri Martin. Une collection centrée sur le village de Labastide-du-Vert, berceau de cette famille généreuse et jadis lieu de résidence de l’artiste. Le maire de Cahors a profité de l’occasion pour indiquer que l’inauguration du musée après rénovation aurait lieu le 6 mai. « Nous avons souhaité une ouverture participative. Nous n’avons jamais eu autant besoin de culture qu’en ce moment » a remarqué le premier magistrat. « Il dit juste, et l’entame de cette chronique souligne cette nécessité » note Sibelle.
Si notre société est malade, il existe des raisons d’espérer. Henri Martin se rattache au post-impressionnisme lit-on sur les notices spécialisées. Sibelle et moi, nous aimons les couleurs de ses toiles, notamment voire surtout quand elles fixent à jamais un paysage d’été ou d’automne. Le ciel flamboie. Nous sommes embarqués dans un voyage merveilleux. Et l’on pense et repense invariablement à la phrase de Maurice Faure qui devient comme une antienne dans cette chronique, mais qui a dit mieux ? « Nous sommes pauvres mais nous sommes beaux… »
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