Sibelle, les lois du ballon ovale, la loi des drames en série et nos enfants devenus des scorpions
Chaque samedi, l’actualité lotoise vue par Philippe Mellet et surtout par ses chats.
Lundi._ En ce lundi de Pentecôte, désormais jour férié qui ne l’est plus tout à fait mais qui le demeure quand même, Cadurciens et Lotois de toujours ou d’adoption savourent « l’info » du week-end. Cahors a décroché son ticket d’accession et évoluera la saison prochaine en Fédérale 1. « Ça fait longtemps que l’on se bat pour ça. C’est un beau symbole, une belle récompense pour les supporters, les bénévoles, les dirigeants et la ville » déclare dans Medialot Didier Valade, le président du club des Ciel et Blanc. Il me faut expliquer à ma protégée féline les arcanes et subtilités des règlements (c’est au nombre d’essais que la montée a été actée) et de la hiérarchie en terme de ballon ovale. Alors que nos voisins (ou presque) de Montauban fêtent leur accession au sein du Top 14, je précise à Sibelle qu’il existe dans le rugby comme dans le football (et dans désormais bien des disciplines sportives) plusieurs univers : le monde 100 % professionnel, le monde 100 % amateur, et entre les deux, sans jeu de mots, une sorte d’entre-deux. C’est dans ce sous-ensemble que nos valeureux représentants évoluent. Mais l’heure est d’abord à la joie. Il y avait 3000 spectateurs au stade et bien plus encore au moment de savourer l’événement. Ce fut une belle communion (laïque). Une parenthèse que chacun, au fond, amateur de rugby ou pas, voudrait voir durer. Finalement, il tombait bien ce jour férié. Quand bien même ne l’est-il plus vraiment.
Mardi._ Les détails de la convention signée entre la ville de Cahors, l’État et le parquet (c’est-à-dire l’autorité judiciaire) sont connus. Les patrouilles conjointes vont être multipliées qui regrouperont policiers nationaux et policiers municipaux. Les uns et les autres n’ayant pas les mêmes prérogatives, les mêmes « habilitations ». « Il en va de la sécurité et de la police comme des routes, certaines étant entretenues par des fonctionnaires d’État, d’autres par des agents des collectivités territoriales » en conclut ma tigresse domestique. Je ne sais si la comparaison est vraiment pertinente mais puisque Sibelle m’y invite, j’enchaîne. « Disons que dans nos villes comme sur les routes, l’essentiel est qu’il y ait du bleu. Pour éviter les excès de vitesse ou les réprimer. Pour prévenir les actes d’incivilité ou de délinquance ou y mettre un terme en interpellant leurs auteurs… » suis-je obligé de détailler à ma protégée. Laquelle, d’ailleurs sans autre uniforme que sa sourcilleuse attention, passe une grande partie de ses journées à surveiller ce qui se passe dans ou aux abords de notre modeste jardinet, sur les hauteurs du village.
Mercredi._ Notre pays est de nouveau sous le choc. A Nogent, en Haute-Marne, un collégien de 14 ans est arrêté. Il aurait tué à coups de couteau une assistante d’éducation, jeune mère de famille. Les circonstances mêmes de ce drame épouvantable sont particulières : il s’est produit alors que devant l’établissement, il était procédé à une fouille des sacs des élèves. Dans un monde toujours violent, et pas seulement en France, que l’école (au sens large) ne soit plus un sanctuaire n’est pas nouveau. Ce n’est pas une raison évidemment pour s’habituer. Reste à essayer de comprendre et, là encore, de prévenir. Interdire la vente des couteaux aux mineurs ou aux plus jeunes d’entre-eux, certes. Restreindre ou interdire l’accès aux réseaux sociaux ou aux contenus violents sur Internet, certes. Redonner aux parents qui l’ont perdue une autorité bienveillante mais ferme sur leurs enfants, certes. Sibelle ajoute qu’il conviendrait aussi de prendre à bras le corps la question de la santé en général et de la santé « mentale » en particulier dans les établissements. « Ce collège portait le nom de Françoise Dolto » remarque ma protégée, qui sait que la pédiatre et psychanalyste consacra sa vie aux enfants et adolescents et développa la théorie du « complexe du homard » : selon elle, à l’adolescence, « l’enfant se défait de sa carapace, soudain étroite, pour en acquérir une autre. Entre les deux, il est vulnérable, agressif ou replié sur lui-même. Mais ce qui va apparaître est le produit de ce qui a été semé » avertit-elle. Il faut voir les choses en face : les homards, pour certains, sont devenus des scorpions. Nous avons tous, adultes, une immense responsabilité et un défi tout aussi immense à relever. Une obligation. Il y va de la survie de notre société et des nouvelles générations.
Jeudi._ La kyrielle des mauvaises nouvelles, et l’adjectif est bien faible, continue. Un Boeing se crashe peu après son décollage en Inde. Et dans la soirée, on apprend que l’état israélien bombarde des sites sensibles (comprenez des centres où se développent des armements nucléaires) en Iran. Et si on fermait la télé ? Et si on mettait notre ordinateur sur « off » ? « Ça s’appelle la politique de l’autruche » me gronde Sibelle. Soit. J’accepte la remarque. De toute façon il fait trop chaud pour que je m’en remette à la sagesse voltairienne de Candide et que je me contente de cultiver mon jardin.
Vendredi._ Puisque nous sommes un vendredi 13… Essayons de croire en la chance !Je vais filer cocher quelques cases sur une grille et attendre. Que ferais-je avec 13, 20, 50 100 millions ? Sans surprise, Sibelle se dépêche de répondre à ma place : « Tu pourrais méditer _ ou pas _ cette formule de Stendhal : la chance s’attrape par les cheveux, mais elle est chauve ! » Fermez le ban et bon week-end !