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Sibelle, les gendarmes, les moutons et l’émouvante odyssée d’un minot d’Ukraine 


Chaque samedi, l’actualité lotoise vue par Philippe Mellet et surtout par ses chats. 

La bonne nouvelle est « tombée » en milieu de semaine : « La ville de Cahors a été retenue pour accueillir une antenne de l’Inspection générale de la Gendarmerie nationale (IGGN), représentant 32 agents du ministère de l’Intérieur », selon les termes du communiqué de la préfecture du Lot. L’installation de ces 32 « agents » (qui possèdent le statut de « militaires » ai-je appris dans Le Monde), aura lieu en 2025. 32 personnes, cela fait une trentaine de familles, des logements à occuper, des enfants à scolariser, cela fait des milliers d’euros dépensés chaque semaine pour se nourrir, s’habiller, se distraire… Jusqu’alors basés en région parisienne, ces 32 agents (l’équivalent des bœufs-carottes dans la police) vont participer à la dynamique économique du territoire. 

Reste à savoir pourquoi et comment Cahors a été choisie ? « Et même question pour Morlaix dans le Finistère qui va accueillir 50 agents officiant à la Délégation de la sécurité routière auprès du ministère de l’Intérieur ou pour Saumur dans le Maine-et-Loire où vont atterrir 17 fonctionnaires de la sous- direction du recrutement et de la formation (SDRF) du même ministère de l’Intérieur » ajoute Sibelle qui a consulté la carte fournie par la Place Beauvau qui liste 20 villes bénéficiant de ces « relocalisations » des services. « C’est parce que le dossier de candidature était sérieux, comme l’avait été celui ayant abouti à l’accueil du Centre de contact pour les professionnels de la Direction générale des Finances publiques (45 emplois) » explique la mairie. « Rien à voir donc avec le fait que le nouveau premier adjoint élu en 2020 ait conservé de solides relations à Paris, lui qui fut préfet ? » insiste ma protégée.

 Toujours est-il qu’une fois arrivés à Cahors, les inspecteurs de la gendarmerie seront comme moi : ils tomberont amoureux du Lot. Rien à voir avec l’installation à Charleville-Mézières, dans mes chères Ardennes, de l’Agence nationale des titres sécurisés. C’était il y a une quinzaine d’années. Les premiers mois, un agent immobilier m’avait confié sa déception. Grâce au TGV, les fonctionnaires mutés avaient loué des chambres de bonnes ou dormaient à l’hôtel : ils débarquaient le lundi matin et repartaient le vendredi en milieu d’après-midi vers la capitale. Puis, avec le temps, ils se sont vraiment adaptés et ils ont fini par aimer leur nouvel environnement, emménageant à demeure en famille. A Cahors, pas de risque de les voir filer en TGV. Comme leurs collègues, ils seront vite conquis. Ils comprendront la formule de Maurice Faure : « Nous sommes pauvres mais nous sommes beaux… » 

Ils seront peut-être aussi sensibles, comme Sibelle et moi, à certaines traditions. Ainsi, ne boudons pas notre bonheur de renouer, après deux années « sans », avec la transhumance. Elle conduira plusieurs centaines de brebis et d’agneaux de Rocamadour à Luzech : du mardi 12 avril au samedi 16, la caravane (il y a quasiment autant de suiveurs que d’animaux) descendra des Causses jusqu’aux rives du Lot. On ira avec ma tigresse domestique les saluer, voire les applaudir, sans doute le vendredi, entre Gigouzac et Crayssac. C’est tout simplement une opération exemplaire. Sur le plan purement pastoral, pour les éleveurs, mais aussi sur celui de la communication et celui de la prévention (des incendies), les ovins nettoyant les sous-bois et zones naturelles… En 2019, Sibelle avait été tellement émue qu’au retour, elle m’avait tenu un discours « vegan ». « Comment peux-tu imaginer après un tel spectacle déguster un cabécou ou faire rôtir un gigot ? » avait-elle soufflé. Dès le lendemain toutefois, elle avait oublié ses résolutions. « Si l’on ne mange plus d’agneau, adieu la transhumance » m’avait-elle rétorqué alors que j’ironisais sur sa faculté à retourner sa veste. 

Au moment d’achever cette chronique, comment ne pas évoquer les événements en Ukraine ? C’est-à-dire la guerre. Hasard du calendrier, on commémore ce 18 mars les Accords d’Evian qui ont mis un terme à la guerre d’Algérie (alors que l’on parla longtemps de « simples » événements). Et donc, là-bas, en Ukraine, un théâtre a été bombardé et selon l’Unicef, chaque seconde, un enfant devient un réfugié. Un exilé. C’est à pleurer, c’est à désespérer des hommes. Sibelle pense à Hassan, âgé de 11 ans qui a parcouru 1000 kilomètres tout seul, un numéro de téléphone écrit sur sa main, pour passer la frontière slovaque en venant de l’est de l’Ukraine. Il a désormais retrouvé les siens. Vous savez quoi ? La famille d’Hassan est d’origine syrienne. Elle a fui ce pays à cause de la guerre, déjà. A pleurer, on vous dit. A désespérer. 

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