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Sibelle, les drôles de pavés semés par Railcoop, les charmes du Moyen Âge et le respect dû à Chapou 


Chaque samedi, l’actualité lotoise vue par Philippe Mellet et surtout par ses chats. 

Lundi._ Le tribunal de commerce se donne un délai de deux semaines pour statuer sur le sort de Railcoop. Pourtant, à entendre les experts et même les dirigeants de la société coopérative lotoise, le sort en serait jeté : une liquidation. « On a pavé le chemin de succès futurs » : explique et espère Nicolas Debaisieux, le président de Railcoop, dont la formule semble néanmoins assez hardie s’agissant du secteur du transport ferroviaire. Des pavés sur une voie ne facilitent guère la fluidité du trafic. Il serait certes cruel et trop facile de refaire l’histoire une fois qu’elle est écrite mais force est de constater que Railcoop aura peut-être convaincu du monde (Sibelle, qui avait envisagé un temps de souscrire une part, se frise les moustaches quant à elle d’avoir renoncé), mais pas assez toutefois, surtout du côté des poids lourds du secteur et des gros investisseurs. On peut débattre à l’infini de l’ouverture à la concurrence, mais parmi les acteurs voulant s’engouffrer dans la brèche, même les sociétés spécialisées dites classiques semblent peiner à faire leur trou sur le marché. Alors une coopérative, vous pensez ! Et le choix d’une ligne comme Lyon-Bordeaux via Clermont, fermée en 2014 faute d’une fréquentation suffisante, n’était peut-être pas le plus pertinent. Reste que pour avoir couvert tant de fermetures d’usines quand j’étais journaliste dans les Ardennes, essentiellement des PME du secteur de la métallurgie ou des sous-traitants automobiles, balayés par la mondialisation ou les vautours qu’elle engendre, on ne peut avoir qu’une pensée solidaire envers les salariés de Railcoop. Même créanciers prioritaires, selon la formule en vigueur, ils restent les premières victimes de ce déraillement. Et les sociétaires ? Et les collectivités qui avaient misé quelques centaines, quelques milliers ou dizaines de milliers d’euros ? Les premiers ont leurs yeux pour pleurer, les secondes doivent expliquer à leurs pourvoyeurs de fonds, et donc, notamment, aux contribuables, que l’économie sociale et solidaire n’est pas un casino. 

Mardi._ Une nouvelle venue dans le paysage associatif : il s’agit de la Compagnie Médiévale Cadurcienne, qui a pour but de rassembler des passionnés d’histoire médiévale. « Ensemble, nous allons redécouvrir l’histoire et le patrimoine cadurcien et lotois, et les faire revivre à travers des animations, des fêtes médiévales et la pratique de l’AMHE » explique dans Medialot Rémy Prévost, le fondateur de l’association. Et à destination de ma protégée féline comme des ignares (dont j’étais d’ailleurs jusqu’à découvrir cette information), il indique que cet acronyme désigne les arts martiaux historiques européens, autrement dit l’escrime médiévale. On lui souhaite plein succès. Et au passage, je ne peux que me féliciter d’avoir beaucoup progressé. Non pas sur le plan de l’escrime, mais sur celui des connaissances… Et d’avoir désormais une bien meilleure opinion sur le Moyen Âge. C’est pourtant, des différentes périodes (par rapport à l’Antiquité, à l’histoire moderne et à l’histoire contemporaine) celle qui souffre encore de bien trop de préjugés, d’idées reçues, de fantasmes charriés par des siècles d’ignorance. Il faut dire qu’expliquer que le Moyen Âge s’achève (selon les auteurs) avec la Renaissance, la découverte des Amériques ou la fin de la guerre de Cent ans n’aide pas à soigner une réputation ! Bref. Ne pensez pas, donc, que le Moyen Âge ne fut peuplé que de chevaliers en armure, de moines soldats, de pèlerins plus ou moins fervents, de sorcières, de lépreux, de paysans analphabètes et affamés. Promenez vous dans Cahors ou dans quelques cités du Quercy et vous comprendrez. A défaut, Sibelle vous propose de méditer deux citations savoureuses. La première est de Cavanna : « Les maçons du Moyen Âge savaient parfaitement que Dieu n’existe pas, mais ils espéraient qu’à force de lui bâtir des cathédrales, il finirait par exister. » La seconde est signée de l’immense historien Jacques Le Goff : « Le Moyen-Âge ne m’a retenu que parce qu’il avait le pouvoir quasi magique de me dépayser, de m’arracher aux troubles et aux médiocrités du présent et en même temps de me le rendre plus brûlant et plus clair. » Sur ce, je fais moins le malin à présent. Voilà que ma tigresse domestique me tanne pour s’initier à l’escrime d’il y a 1000 ans… 

Mercredi._ Histoire encore. Mais une histoire encore vivante, si l’on peut dire. Car demeurent encore des témoins, des acteurs. Cette semaine a été dévoilé le programme des conférences, expositions, mais aussi soirées festives organisées dans les jours, semaines et mois à venir pour commémorer les 80 ans de la Libération. On aura évidemment l’occasion d’y revenir régulièrement, sous peu, comme de souligner le formidable travail réalisé par l’Association du musée de la Résistance, de la Déportation et de la Libération et du comité qui prépare le futur espace dédié au Grand Palais… Dans ce contexte, le maire de Cahors Jean-Luc Marx doit résoudre une équation singulière. Un vent de contestation se lève quant au possible déplacement, dans le cadre des travaux de la rénovation de la place, de la statue de Jean-Jacques Chapou, « le » héros de la résistance lotoise… « Il est noyé dans le parking actuel » justifie l’élu. « Dans son discours d’inauguration de la stèle, en 1969, Jean Marcenac expliquait que le buste avait toute sa place au milieu des habitants et de leurs occupations quotidiennes, l’idée initiale était de le fondre dans la masse, qu’il soit entouré de la vie cadurcienne… » lui oppose une de ses descendantes. La mémoire n’est pas qu’un devoir. C’est parfois, souvent, un subtil équilibre. Place Chapou, place du Marché, la statue se fond, de fait, dans la vie qui perdure, dans le cœur battant de la cité. Le combattant d’hier est encore un homme d’aujourd’hui, au milieu de la foule. Il ne faut pas en faire une icône. Le dessein n’est pas le même. Affaire à suivre. 

Jeudi._ Dans un discours dédié à la lutte contre la violence des mineurs, le Premier ministre Gabriel Attal suggère d’imposer à certains sauvageons (comme disait Monsieur Chevènement) d’intégrer des internats. Sibelle ne comprend pas. « Présenter comme une sanction un mode de scolarisation qui pourrait de fait être bénéfique pour des collégiens qui rêvent de sortir de leur ghetto socio-familial (ou dont on pense à raison qu’ils gagneraient à être coupés de certains freins à leur épanouissement dans leur milieu) semble très dommage… » regrette Sibelle. Elle aurait aimé, elle, être interne dans un établissement implanté dans un petit bourg rural, pouvoir faire du sport après les cours, s’adonner à des activités culturelles, pouvoir se balader le long des prés ou des sous-bois tout en récitant ses théorèmes ou ses déclinaisons. Surtout que l’expérience a déjà été testée et que ça marche. Que des gamin(e)s de quartiers ou milieux en difficulté ont pu ainsi échapper à des spirales négatives. Incontestablement, certains de nos gouvernants, par ailleurs brillants, présentent un handicap notoire : ce n’est pas une question d’âge, mais d’avoir été ou non confronté à la « vraie vie ». 

Vendredi._ Le week-end s’annonce ensoleillé. Il a débuté dès jeudi soir avec la qualification au bout de 120 minutes de suspense et de plusieurs tirs au but de Marseille en coupe d’Europe. Il se prolonge ce vendredi avec le passage de la transhumance à quelques hectomètres de notre vieux village. Et puis reste à savoir à quoi nous allons nous consacrer avec ma tigresse ce samedi et ce dimanche. Une sieste, une sortie en ville, ou à la campagne dans un vide grenier ou je ne sais quelle expo ou fête de village. Avril s’achève doucement. Mai se profile déjà. On revit, quoi. 

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