Sibelle, les châtelains de Roussillon, la turbidité de l’eau du robinet et la réforme qui fâche
Chaque samedi, l’actualité lotoise vue par Philippe Mellet et surtout par ses chats.
Lundi._ Il y a fort heureusement des nuances en matière de télé-réalité. Le temps est loin où l’on se contentait d’enfermer quelques jeunes gens consentants dans une maison truffée de caméras et de ne diffuser que les scènes les plus cocasses ou les plus délirantes pour flatter nos vils instincts voyeuristes. Désormais, certaines émissions permettent de suivre, comme des feuilletons dont les héros sont de vraies personnes dans la vraie vie, le parcours ici d’une famille nombreuse, là d’une autre qui a décidé de vivre dans un château. C’est ainsi qu’avec Sibelle, nous avons commencé à regarder cette semaine sur la 6 les aventures de Charlie et Julien (et de leur petit garçon Marcel), nouveaux propriétaires du château de Roussillon, à Saint-Pierre-Lafeuille. Par séquences, nous avons aperçu, sous forme de teasing, l’imposante silhouette de la place forte médiévale, se dressant désormais au sein d’un environnement boisé, mais qui n’a rien perdu de sa noble et fière architecture militaire. Je jette un œil sur la notice de la base Mérimée (celle des édifices protégés au titre des monuments historiques). Je lis étonné qu’elle localise le château sur Maxou. Pour le reste, elle le date des XIIème et XVème siècles et indique : « Le château commandait tous les abords nord de Cahors et les vallons qui aboutissent au Lot. L’enceinte, bien que démantelée, est encore à peu près complète, avec des tours formant bastions d’angle. A l’intérieur se trouvent les restes de deux corps de logis et de plusieurs autres tours circulaires, dont un donjon à peu près intact jusqu’à hauteur des mâchicoulis. Le château a servi de carrière de pierres. » Ajoutons que son sauvetage puis sa restauration ont débuté dans les années 1960, qu’une partie est désormais habitable et qu’il accueille des réceptions. Mais revenons à Charlie, Julien et Marcel. Pour l’heure, sur M6, on observe surtout que les parents qui ont eu un coup de foudre pour le domaine où se déroula leur mariage sont occupés à expliquer à Marcel que son quotidien va changer… Et surtout, on sourit en les voyant faire leurs cartons et déménager, aidés de quelques amis dont l’un est surtout venu pour faire rire la galerie. Adieu l’appartement au 4ème étage dans la capitale (à Barbès, précisément). Adieu le brouhaha et les sirènes quand on ouvre les fenêtres… Charlie et Julien vont bientôt profiter du ciel étoilé et des nuits calmes du Quercy. Les nouveaux châtelains vont prendre le temps de vivre autrement. La suite dès lundi.
Mardi._ On appelle cela un running gag. Même si cela n’est pas très drôle. Qui dit « orages violents avec fortes précipitations » dit « menaces sur la qualité sanitaire de l’eau du robinet à Cahors ». Ainsi, cette semaine, il a de nouveau été vivement recommandé aux habitants de Cahors, trois jours durant, de ne boire que de l’eau en bouteille (distribuée par la ville). On en profite pour remarquer que sur le plan de la communication, il y a quand même des progrès à faire. Il devient vraiment gênant que la ville de Cahors et le Grand Cahors utilisent les mêmes supports de communication sur Internet. Que les services soient mutualisés, très bien, mais que le site web et les comptes sur les réseaux sociaux soient les mêmes, cela ne contribue guère à la clarté de l’info. Exemple le lundi 13 avec ce communiqué : « En raison des fortes pluies ayant entrainé un phénomène de turbidité, la Ville de Cahors informe que l’eau distribuée par le service de l’eau du Grand Cahors ne doit pas être consommée… » Désolé, mais ce n’est pas clair, il y a une sorte de turbidité aussi dans le message. Tout le monde ne sait pas forcément qui fait quoi. Quid des autres communes du Grand Cahors par exemple ? Et le plus étonnant est la conclusion : « Concernant les 1 150 foyers de la commune alimentés par d’autres syndicats de distribution d’eau, la Ville de Cahors invite les Cadurciens à se rapprocher de leur syndicat… » Personne, à l’intercommunalité, pour passer les coups de fil adéquats et donc informer les usagers et cochons de payants ? Et jeudi 16, les infos ont été plus lapidaires encore : « Le taux de turbidité observé est revenu dans les normes en vigueur (…). En conséquence de quoi, il est de nouveau possible de consommer l’eau distribuée par le service du Grand Cahors et ce, sans aucune restriction. » Ma protégée bougonne. Elle s’en fiche bien, elle, de savoir si oui ou non l’eau du robinet est potable. Son bonheur, c’est de boire accroupie l’eau croupie dans les coupelles des pots de fleurs ou dans les flaques, sur le parking en bas de la rue.
Mercredi._ Il n’y a pas que la réforme des retraites qui fait râler. Après les écoles, ce sont les collèges et lycées du Lot qui sont visés par une baisse de moyens. Huit postes pourraient être supprimés dans le second degré à la rentrée prochaine. Sibelle qui jette toujours un œil sur l’actualité dans les Ardennes, où nous habitions avant de « descendre » dans le Quercy il y a déjà plus de sept ans apprend qu’à Signy-l’Abbaye, chef-lieu de canton de 1400 habitants, les profs du collège ont organisé une manif d’un nouveau genre. Pour protester contre la suppression d’une classe, ils ont posé nus juchés sur des bottes de paille. Avec des banderoles quand même pour cacher ce que l’on ne saurait voir. Il y était écrit par exemple : « Collège rural à poil sur la paille ». Un exemple à suivre dans le Quercy ? « Sur la banderole, serait-il alors possible d’écrire cette simple formule de Maurice Faure ? Nous sommes pauvres mais nous sommes beaux… » conclut Sibelle.
Jeudi._ Journée chaotique et chahutée à l’Assemblée. La Première ministre, au terme d’une énième réunion de crise à l’Elysée, annonce dans un rare brouhaha recourir au 49.3 pour faire passer sa réforme des retraites, car « il faut rassurer les marchés si l’on veut rembourser notre dette à des taux raisonnables », aurait expliqué, en « off », le chef de l’État. Il n’y aura pas de vote. Ou plutôt si, mais s’il n’y a pas eu une majorité de députés pour la voter, il est probable qu’il n’y en aura pas non plus pour censurer le gouvernement. Etrange paradoxe de nos institutions. Dans ce contexte, le député Pradié est visé par de nombreux élus et éditorialistes. Meneur des frondeurs chez LR, il n’exclut pas de voter une motion déposée par les centristes du groupe LIOT. Il se donne le week-end pour réfléchir. A gauche, d’autres réfléchissent aussi. En juin dernier, leur maintien au second tour avait aidé à la réélection de députés de la majorité. Ces dernières semaines, ils ont manifesté cependant contre la réforme. Sibelle me demande mon mot de passe et mon numéro de carte bancaire. « T’inquiète pas. C’est juste pour acheter une boussole sur Internet ».
Vendredi._ On se quitte par un hommage et un clin d’œil. Peu d’athlètes peuvent se vanter d’avoir donné leur nom à une technique. C’était le cas de Richard Fosbury, décédé le week-end dernier. Champion olympique au saut en hauteur à Mexico en 1968, il avait inventé et ainsi popularisé le saut en rouleau dorsal. Ma tigresse, qui sait faire preuve de qualités sportives et athlétiques peu communes, comme tous les félins, me demande si je fus un bon élève de Richard Fosbury. Je réponds que non. Même s’il y avait un gros tapis derrière le fil, j’ai toujours eu du mal à bien coordonner mes mouvements et prendre suffisamment d’élan pour effectuer des sauts dignes de ce nom. Lors des séances d’EPS dédiées au saut en hauteur, j’esquissais une sorte de ciseaux avec les jambes puis de torsion dorsale plus qu’improbable et retombais comme un arbre mort les pieds emmêlés dans le fil. Les autres élèves s’esclaffaient. Mon prof levait les yeux au ciel. C’est pourquoi j’ai la plus haute estime pour ce champion si tôt disparu. Il alliait une puissance et une grâce que je n’atteindrai jamais.
Visuel DR