Chaque samedi, l’actualité lotoise vue par Philippe Mellet et surtout par ses chats.
Lundi._ C’est le mot de la semaine : « blocages ». Les agriculteurs disent leur désarroi en multipliant les blocages sur les axes autoroutiers, et le quart sud-ouest du pays se révèle le plus touché. Dans le Lot, c’est la sortie Cahors-Sud qui concentre les difficultés. Dans la mesure où je ne possède par l’expertise nécessaire pour avoir un avis sur les mesures à mettre en œuvre pour contrer la dermatose qui affecte les élevages bovins, et ma protégée féline pas davantage, je me contente d’observer, et d’écouter. Comme à chaque poussée de fièvre (sans jeu de mots), on devine aisément que le malaise des paysans est plus global. Il y a la concurrence déloyale que risque d’accroître le Mercosur (encore que certains secteurs de l’agriculture pourraient y décrocher des marchés, notamment les producteurs de fromages), il y a des normes administratives et sanitaires toujours plus complexes, il y a une nature dont les paramètres s’affolent (d’où des épisodes météorologiques et climatiques toujours plus violents et plus dévastateurs) et enfin, évidemment, des prix trop bas qui ne récompensent pas, dans la majorité des filières, les efforts d’hommes et de femmes qui travaillent plus de 50 à 60 heures par semaine et parfois ne peuvent même pas se verser un SMIC. On peut désigner tour à tour les coupables, qu’ils soient à Bruxelles ou à Paris, qu’il s’agisse de la grande distribution, des intermédiaires, des grosses exploitations qui écrasent les petites, et on ne parle pas des mutuelles et des banques, lesquelles ont laissé des exploitants s’endetter jusqu’au cou. A situation compliquée, difficile d’imaginer qu’il y ait des réponses simples voire simplistes. Je m’en remets, et ma tigresse domestique aussi, à une attitude solidaire toute simple. J’essaie d’acheter et de manger français, voire local. Après tout, on n’est pas les plus mal lotis dans le Lot même si on ne peut pas déguster du foie gras à tous les repas. Mais on a des éleveurs, des producteurs, des maraîchers…
Mardi._ Pendant ce temps, à la télé ou sur Internet, on voit des centaines de nos concitoyens faire la queue devant les librairies où Nicolas Sarkozy vient dédicacer son ouvrage écrit pendant et tout aussitôt sa sortie de la Santé, le « Journal d’un prisonnier ». Des extraits circulent (pas toujours authentiques) où l’ont lit que l’ex-président a du mal à téléphoner ou à s’habituer à faire son jogging sur un tapis roulant. Certains se moquent, d’autres avancent des comparaisons sans doute exagérées. L’ancien chef de l’État n’est ni Victor Hugo ni Alexandre Dumas. Sibelle, pour sa part, regrette que ni l’intéressé (semble-t-il) ni les politiques et journalistes n’en profitent pour poser des questions pourtant essentielles. Est-ce que la prison répond aux missions qui sont les siennes ? C’est-à-dire priver un(e) détenu(e) de sa liberté d’aller et venir mais envisager aussi qu’il puisse payer sa dette à la société tout en amorçant un chemin qui va l’amener à s’amender, et ensuite à sortir sans risquer de récidiver ? Vous le savez comme moi : avec des taux de surpopulation parfois de 200 %, des détenus dormant par terre, une violence quotidienne, c’est pour l’instant évidemment le contraire.
Mercredi._ Plus un jour ou presque sans qu’une entreprise privée ou une administration (et ce n’est pas rien quand il s’agit comme cette semaine du ministère de l’Intérieur…) sans que l’on apprenne qu’une « cyberattaque » s’est produite. Sans que des as de l’informatique n’aient réussi à s’introduire dans un système mal sécurisé pour s’emparer de données sensibles. A des fins mercantiles (il demandent une rançon) ou politico-militaires (on parle ainsi d’ingérences étrangères). « C’est flippant » lâche Sibelle. Qui oublie de préciser que quand elle fait un achat sur le Net ou qu’elle s’inscrit sur un réseau social, c’est en utilisant ma carte bleue ou mon adresse mail. Et je ne parle des pas téléphones mobiles qui sont devenus des vrais mouchards, des drones ou satellites qui détectent le moindre mouvement ou la moindre piscine construite clandestinement, des traces ADN que l’on peut laisser et donc trouver partout. Big Brother, Big Data, tout ça… Et il ne manquait plus que l’IA et les robots qui dans certaines usines sont désormais capables de remplacer des ouvriers pour assembler une voiture, par exemple. Cette société nous échappe, notre vie même nous échappe. « Despote conquérant, le progrès technique ne souffre pas l’arrêt. Tout ralentissement équivalant à un recul, l’humanité est condamnée au progrès à perpétuité… » concluait déjà l’économiste Alfred Sauvy.
Jeudi._ On apprend que le propriétaire du château de Marcillac à Lendou-en-Quercy qui a engagé des travaux de restauration d’ampleur va bénéficier d’un soutien de la Mission Patrimoine. Un peu plus de 200 000 euros qui seront accordés au fil des chantiers et au vu des factures. L’édifice sauvé de la ruine à l’orée des années 1960 fut de plus incendié en 2018. Parmi les trésors architecturaux du site, une merveille d’escalier Renaissance mais aussi une chapelle dédiée semble-t-il aux pèlerins de Saint-Jacques. Sibelle est satisfaite de ce choix, mais me réserve une surprise dont elle a le secret. Elle envisage de candidater l’an prochain. Et donc de solliciter la Mission pour restaurer un muret, sur le haut du village, en lisière du maquis. Un simple muret en pierre sèche qui se dégrade au fil du temps mais dont la richesse est ailleurs : ma protégée en a fait l’un de ses postes d’observation favoris en période de chasse.
Vendredi._ Les écoliers sont en vacances, et Noël approche. Dans quelques jours, il sera temps de découvrir les présents déposés au pied su sapin. Et de rêver un peu. Une parenthèse de paix, de joie, de sérénité. Un moment suspendu. Un moment de nostalgie, aussi. Un moment hors du stress de l’actualité. Je l’avoue, ce sera le premier des cadeaux. Et pas le moindre. Avec Sibelle, nous vous souhaitons donc un bon Noël. Tout simplement, mais très sincèrement. Et profitez bien car quelque chose nous dit que la trêve sera courte…





