Sibelle, le Lot qui fait son cinéma, les ambitions de Madame Delga et les pétitions à répétition
Chaque samedi, l’actualité lotoise vue par Philippe Mellet et surtout par ses chats.
Lundi._ Le Lot est une terre de cinéma. Le succès du festival de Gindou, où l’on a compté jusqu’à plus de 1000 spectateurs certains soirs de la semaine dernière, en plein cœur de la Bouriane, l’aura du Grand Palais à Cahors, la rénovation en cours de la salle de Prayssac en sont des preuves concrètes. Patrie de Charles Boyer qui avait conquis Paris puis Hollywood, terre d’adoption de Louis Malle qui y tourna son film le plus troublant, « Lacombe Lucien » – liste évidemment non exhaustive -, notre département connu pour ses ciels étoilés est une immense salle « obscure », mais l’adjectif est ici ambigu. Ma protégée féline s’en remet à la formule de Jean-Luc Godard. Et si ce constat traduisait une forme de résolution, de volontarisme tranquille ? Et si, dans le Lot, on préférait lever la tête pour observer les grands écrans que baisser les yeux en direction des téléviseurs ou des tablettes ?
Mardi._ Notre département demeure aussi un petit volcan faussement éteint qui à tout moment ne demande qu’à se réveiller. Il n’est qu’à observer certaines étincelles rougeoyantes (ou verdoyantes, en tout état de cause incandescentes) qui surgissent ici et là. Un projet d’implantation d’éoliennes à Dégagnac, de parc photovoltaïque à Tour-de-Faure, de complexe d’hôtel avec golf à Albas ou de base de loisirs XXL à Cayx : à chaque fois, les Lotois (une partie d’entre-eux, en tout cas,) pétitionnent, manifestent, affichent, organisent des réunions, interpellent élus et représentants de l’État. Les arguments varient. Il s’agit ici de préserver un patrimoine paysager et écologique, là, de contester le bienfondé économique dudit projet. Parfois les deux. Avec Sibelle, nous observons, et nous n’avons pas de point de vue forcément très aiguisé, très argumenté, sur ces divers dossiers. On s’étonne éventuellement de la timidité de certaines réactions officielles. Pour dire les choses autrement : faut-il être compétent (au sens où l’entendent les lois de décentralisation) pour avoir et exprimer un avis ? Mais au final, avec ma tigresse, nous voyons tout cela d’un bon œil : tant que l’on proteste, quand bien même ce peut être à tort, c’est qu’on est en vie.
Mercredi._ Cérémonie d’ouverture des Jeux Paralympiques. Qu’on apprécie ou pas la mise en scène n’a réellement pas d’importance. Les vraies stars, de toute façon, ce sont les centaines d’athlètes. Certains en fauteuils, d’autres équipés de prothèses, handicapés depuis la naissance, des suites d’un accident ou d’une maladie. Ce sont tous des héros. Sportifs, ils sont venus pour gagner, pour remporter une médaille, mais on comprend que la plus belle victoire est déjà qu’ils soient là. Si les tribunes sont pleines dans les jours qui viennent, alors, ces Jeux seront réussis. Il n’y aura pas besoin de consulter le tableau des nations les plus médaillées. Ils suffira de filmer – et donc de voir – tous ces athlètes sourire.
Jeudi._ Les consultations se poursuivent à l’Elysée. Ce jeudi, sont reçus notamment David Lisnard et Carole Delga. L’un est maire de Cannes, porte le flambeau d’une droite résolument libérale. L’autre est présidente de notre chère Occitanie, et se revendique socialiste modérée, ou résolument socio-démocrate si l’on préfère. Le premier est par ailleurs président de la puissante Association des maires de France, la seconde dirige l’association Régions de France. C’est en ces qualités qu’ils sont invités par le chef de l’État, mais tout aussitôt, et les intéressés semblent apprécier cette perspective, les observateurs les rangent dans la catégorie des potentiels premiers ministres… D’ailleurs, on en connaît quelques- uns, et quelques-unes, dans le Quercy, qui doivent allumer des cierges, et pas seulement à Rocamadour, pour que Madame Delga soit l’heureuse élue. Ou au contraire, pour que ce ne soit pas elle… A l’heure où avec ma protégée (qu’agace le laborieux ballet de mes doigts sur le clavier) nous écrivons cette chronique, Emmanuel Macron n’a toujours pas annoncé sa décision. C’est toujours un gouvernement composé de ministres démissionnaires qui administre notre pays. Mais il nous faut l’avouer : nous ne sommes, ni elle ni moi, candidats. Matignon, c’est pas pour nous. L’Elysée non plus d’ailleurs. Nous sommes trop attachés à notre point de vue matinal, quand depuis le bolet, ou depuis la fenêtre de la salle à manger, s’offre à nos yeux le spectacle sans pareil de la brume qui se lève sur la vallée et les parcelles de vignes, et que dans les ruelles encore sombres du haut du vieux village, quelques chats débutent leur ronde… ou concluent leur nuit de maraude.
Vendredi._ En bon fils d’enseignant, je souhaite une bonne rentrée à tous les profs (et personnels de l’Education nationale). En bon citoyen, je souhaite aussi la bienvenue à Sophie Sarraute, nouvelle directrice des services de l’Education nationale dans le Lot. Elle arrive de Paris où depuis mai, elle était conseillère Éducation et Jeunesse auprès du Cabinet du Premier ministre Gabriel Attal. Nous n’ironiserons pas sur le timing. Ben oui, il n’est pas anormal de retrouver un poste à la hauteur de son expérience quand on était au service d’un Premier ministre sur le départ. Nous ignorons en revanche si la nouvelle DASEN a quelque lien de parenté avec l’immense romancière Nathalie Sarraute, qui entra dans la Pléiade de son vivant. Pour reprendre un titre de cette pionnière du Nouveau Roman, nous lui souhaitons de cueillir dans le Quercy des « Fruits d’or ». Et que les élèves lotois possèdent pleinement, grâce à elle, au sens propre et au sens figuré, « L’Usage de la parole ».