Sibelle, le blues de l’an neuf et celui qui nous ravira cet été
Chaque samedi, l’actualité lotoise vue par Philippe Mellet et surtout par ses chats.
Lundi._ On voudrait que la trêve de Noël se poursuive un peu entre deux réveillons, entre deux jours fériés. Mais tout n’est qu’illusion. Avec ou sans « s ». Primo, il n’y a pas eu réellement de trêve de Noël, ni ici ni ailleurs, secundo, la télé et les infos se chargent de nous injecter notre dose quotidienne de catastrophes, de malheurs, de pleurs, de colères. Alors, ce lundi, on apprend qu’un avion a heurté un mur en bout (oui, on se demande bien ce qu’il faisait là) de piste après son atterrissage précipité à Muan (Corée du Sud), causant la mort de 179 personnes, et que dans le même, temps, à Mayotte, dévastée par un cyclone, le Premier ministre François Bayrou dit souhaiter rebâtir mais bannir les bidonvilles. Le problème, c’est que faute de mieux, dans l’urgence, une partie de ces baraques de fortune faites de bois et de tôles est déjà en train d’être plus ou main relevée. Sibelle se saisit de la télécommande et ferme la TV. Puis elle me sermonne : « Regarde plutôt la brume qui se lève tout doucement et découvre une par une les parcelles de vigne, là-bas, près de la rivière. Regarde les jeunes mésanges qui viennent picorer les petites graines que tu as posées sur le rebord du bolet et que moi-même, je me refuse de chasser (c’est dire si le spectacle est sacrément envoûtant), regarde les frêles roses de notre jardin qui ont réussi à vaincre les premiers gels et premiers givres pour survivre jusqu’à l’an neuf, regarde encore et toujours les murets de pierre sèche qui montent vers le maquis du causse et où, dans quelques mois, pousseront les orchidées sauvages… Allez, relève la tête, garde le cap ! » J’ai presque souri. J’ai presque senti une larme couler. Heureusement que ma tigresse sait trouver les mots pour que je ne sombre pas dans une mélancolie pernicieuse…
Mardi._ Selon l’expression consacrée, s’écrit aujourd’hui la dernière page du grand livre de l’année 2024. Pourtant, c’est déjà l’heure des vœux. Avant qu’en soirée le président Macron esquisse un mea culpa et nous promette ce qui pourrait ressembler à des referendums, dans notre département, le président Rigal tire le premier et invoque la solidarité. « La solidarité dans le Lot n’est pas affaire de slogans, mais d’actes concrets, quotidiens. Dans les épreuves, cette valeur nous guide. Elle est une force qui nous permet de tenir ensemble par-delà nos différences, de rendre pas à pas le présent meilleur… »A la lecture de ces mots, on en viendrait presque à culpabiliser de réveillonner en famille à la chaleur du poêle à bois. De déboucher une bouteille de champagne millésimée et de sortir du cellier une conserve de foie gras. Mais ces quelques libations et ces petits trésors gourmands ne sont en fait que des totems quasi décoratifs. L’essentiel est d’être entouré de ceux qu’on aime et qui nous aiment (à tout le moins nous supportent). Et quand approche le décompte, peu avant minuit, ma chère Sibelle lève sa coupe et y va de son petit couplet : « Je ne sais pas si nous sommes pauvres, mais nous sommes beaux ! » Fermez le ban !
Mercredi._ A peine le temps de lire les textos sur le portable et les messages audio sur les répondeurs que Medialot nous offre ce 1er janvier une excellente nouvelle : après quelques années chaotiques, le Cahors Blues Festival annonce que l’édition 2025 se tiendra les 10, 11 et 12 juillet à l’espace Valentré avec une scène à l’intérieur et une autre en extérieur. Le Village du Blues programmera par ailleurs des concerts gratuits. On ne peut choisir lieu plus emblématique. Surtout que le site rapprochera l’événement du centre-ville via les allées Fénelon… Ma protégée y va de son commentaire : « Je ne sais vraiment si la musique adoucit les mœurs, mais elle nous réchauffe le cœur ». J’ajoute ceci : « Quand on a des bleus à l’âme, le blues ranime la flamme. » Et je vous le jure, ceci n’est pas seulement écrit pour le plaisir de la rime… Une question demeure néanmoins : le diable du Pont Valentré nous fera-t-il l’honneur de descendre de son perchoir pour se trémousser avec le vil peuple ?
Jeudi._ Toujours sur mon site d’info préféré, on apprend qu’en 2024, l’octroi situé sur le pont Louis-Philippe de Cahors a accueilli et renseigné 9294 randonneurs (et/ou pèlerins) qui ont fait étape dans notre bonne ville de Cahors alors qu’ils empruntaient le chemin de Saint-Jacques-de- Compostelle. On ignore les motivations de chacun d’eux. Car ce n’est pas toujours si simple, évidemment, que de marcher quand le soleil tape fort ou que les orages se déchaînent. Quête spirituelle, envie de se « nettoyer le corps et l’esprit », de s’offrir une parenthèse hors du temps et hors du stress de la vie quotidienne ? Sibelle n’ignore pas que les historiens sont parfois dubitatifs sur le sujet, comme les sociologues. Mais elle ne désespère pas de me convaincre. Un jour, si vous m’apercevez avec ma petite tigresse, chaussés des brodequins de rigueur et le bâton à la main (ou à la patte), ne soyez pas surpris. Je ne pense pas qu’on ira très loin. Cahors-Montcuq serait par exemple un très bon ballon d’essai. Nous marcherons un peu comme le faisaient Montaigne et La Boétie. « Marcher, penser, l’un ne va pas sans l’autre » expliquait le premier nommé. Je vous annonce déjà que le moment venu, il ne faudra pas rater le « best of » des réflexions que ne manquera pas de distiller ma belle après ces quelques kilomètres. Voici en exclusivité le titre du premier chapitre : « Sibelle et les ampoules magiques ».
Vendredi._ Ah, voilà déjà l’Épiphanie. J’ai manqué de réflexe, décidément, je ne serai jamais un bon commercial. J’aurais dû imaginer une série spéciale de fèves à l’effigie de Sibelle. Vous imaginez la belle surprise au moment de goûter la traditionnelle part de galette ? Et quitte à faire, j’aurais pu intégrer une capsule sonore. Avec ces mots : « Qui m’aime me croque et se casse une dent… » Ben quoi, c’est pas une question de couronne tout cela ?