Sibelle, la mort de Bernard Pivot, la flamme et la flemme des Jeux
Chaque samedi, l’actualité lotoise vue par Philippe Mellet et surtout par ses chats.
Lundi._ C’est toujours le même désarroi qui nous saisit, quand une célébrité nous quitte. Une part de notre propre personne, de nos souvenirs, de nos vies, s’en va avec elle. Bernard Pivot était un homme honnête et un honnête homme. Le vendredi soir, pendant des décennies, il est venu nous parler de livres et d’écrivains, et on regardait la télé en sachant qu’on dormirait ensuite un peu moins bête. On ne lirait pas tous les livres dont il avait été question, mais qu’importe. Et puis on connaissait aussi de ce journaliste présentateur un peu à part quelques aspects qui nous le rendaient plus proches encore : il appréciait le football et le bon vin. Sibelle sait qu’il était un des rares à pouvoir arracher quelques phrases à Patrick Modiano et que sans lui, on aurait déjà oublié Georges Dumézil ou Claude Lévi-Strauss, sauf à avoir fait Normale Sup. Lors de l’émission spéciale qui fut sa « dernière », Bernard Pivot eut la délicatesse d’inviter sa concierge qui lui montait chaque jour des colis chargés de livres. Il est mort au moment où nos élites ont jugé que l’on pouvait supprimer des grilles de la TV le jeu des Chiffres et des Lettres. On va finir par croire que la télé qui rend moins sot n’est plus de mise.
Mardi._ Paris Saint-Germain est éliminé de la Ligue des Champions. Deux jours plus tard, c’est l’OM – peuchère – qui prend cher à Bergame et sort de la Ligue Europa par la petite porte. Le foot français est à l’image du pays. Au bord de la crise de nerfs. Ce ne sont pas les millions qui manquent, ni la bonne volonté, mais peut-être un supplément d’âme. Et cela ne s’achète pas.
Mercredi._ Etait-ce voulu ? En tout cas, avec ma protégée féline, on ne trouve pas que ce fut une bonne idée que l’arrivée de la flamme olympique sur le sol français ait été fixée ce 8 mai. Laissons ce jour-là à ceux qui ont donné leur vie pour notre liberté. Mais bon, faisons avec. Ou plutôt sans : pas de trêve olympique à l’horizon, ni en Ukraine, ni au Proche-Orient, ni partout ailleurs où les hommes et femmes d’aujourd’hui continuent de fraterniser à coup de missiles et de bombes. Il y aurait de quoi désespérer. Mais on est de doux rêveurs, nous autres, dans la vallée du Lot et sur les Causses. Nous connaissons la leçon reprise par Malraux dans son discours d’entrée au Panthéon de Jean Moulin et son allégorie liée aux chênes nains du Quercy. Ceux que les Allemands d’alors trouvaient trop petits. Mais ceux qui symbolisèrent au contraire une terre de résistance. Passons et transmettons cette flamme. Elle vaut bien l’autre, non ?
Jeudi._ On apprend que le Pont Valentré a besoin d’un sérieux lifting. La ville de Cahors en appelle à la fondation du patrimoine. Les travaux s’élèvent à plusieurs millions. « Diable, c’est une sacrée somme » glisse ma protégée qui connaît par cœur ses classiques en terme de légendes locales. Et de suggérer que l’on instaure une taxe sur les objets dérivés et images à l’effigie du Pont. On l’appellera la taxe Valentré. Monsieur Marx, maire de Cahors, pourra ainsi constituer un petit capital pour lancer le chantier. Je sais : ce n’est pas le meilleur jeu de mots de l’année, mais les premières chaleurs font leur effet.
Vendredi._ Car s’il y a bien une semaine où il est question de pont et même de viaduc, c’est celle qui s’achève. Deux jours fériés d’affilée, ce n’est pas tous les ans. Alors avec ma belle, on s’est accordé une petite parenthèse. On a filé vers la mer, côté Roussillon. Plus de 8 heures pour faire Cahors-Perpignan via Toulouse. On s’en souviendra. Les bouchons sur la route, cela participe déjà des vacances, même réduites. Comme jadis le générique d’Apostrophes. Il nous faisait saliver. Alors on a été patients. Et une fois parvenus à destination, on avait déjà le sentiment qu’une part de nos vacances était réussie.
