Sibelle ira-t-elle se faire vacciner à Cannes ?
Chaque samedi, l’actualité lotoise vue par Philippe Mellet et surtout par ses chats.
Sans doute avaient-ils encore en tête les images incroyables de début janvier, diffusées en direct, quand le monde entier assista à l’assaut du Capitole, temple de la démocratie américaine, par des militants pro-Trumpistes (voire carrément néo-nazis pour certains). Peut-être ont-ils imaginé que, de celui de Washington à celui de Toulouse, il y avait une symétrie à dessiner. Toujours-est il que jeudi, des militants se réclamant de l’Action Française ont tenté de pénétrer dans l’hémicycle du Conseil régional d’Occitanie, qui d’ailleurs ne se trouve pas au Capitole. Le nom même de cette organisation et ce type de provocation nous renvoient aux Années Trente. Quand les factieux et les fachos de notre pays, gagnés par la même fièvre qu’en Italie et en Allemagne, voulaient prendre l’Assemblée, renverser la République, basculer vers le pire. Sibelle a peur. Comme la plupart des représentants du règne animal, ma protégée féline n’a pas besoin de regarder le bulletin météo pour être sur ses gardes quand le temps est à l’orage. Je la rassure. Le pire n’est jamais sûr. Faut-il savoir serrer les rangs et les dents. En héritiers fidèles de Gambetta, foi de Lotois, nous allons faire face. Il nous reste encore quelque chance de passer entre les gouttes.
Cette dernière phrase est également valable en cette période de crise sanitaire. Car dans notre département aussi, les chiffres sont à la hausse. La courbe de la vaccination est à la hausse, mais celle des contaminations et du nombre de cas graves, nécessitant des soins hospitaliers, semble plus dynamique, hélas. Là- dessus, avec Sibelle, nous avons entendu le maire de Cannes à la télé. Prenant le président Macron au mot, il veut accélérer la cadence dans sa ville. Selon les chiffres qu’il avance, « toutes les personnes de plus de 75 ans ayant souhaité être vaccinées ont déjà reçu au moins une première dose, soit 9 000 sur les 12 000 que compte la ville (3 400 ayant reçu deux injections et 5 600 avec un deuxième rendez-vous programmé) ». En pourcentage, cela fait 75 % de cette classe d’âge particulièrement vulnérable. Or, jeudi, Olivier Véran indiquait lors de sa conférence de presse qu’à l’échelle du pays, « plus de la moitié des plus de 75 ans » avaient reçu au moins une injection. Si le nombre avait été nettement supérieur, le ministre l’aurait dit. Il aurait dit « 60 % », « les deux tiers »… Il a préféré s’en tenir à « plus de la moitié ».
Du coup, ma protégée n’y va pas par quatre chemins. « De deux choses l’une : ou bien il faut d’urgence remplacer Olivier Véran par le maire de Cannes David Lisnard au ministère de la Santé, ou bien, quand bien même la situation sanitaire est plus préoccupante dans les Alpes Maritimes que dans le reste du pays, il y a là comme un début de rupture dans l’égalité des citoyens dans l’accès aux soins… »
Restons à Cannes, une des capitales du cinéma. Même s’il n’était pas un fana des tapis rouges et préférait sa bonne ville de Lyon et le festival Lumière… La mort de Bertrand Tavernier est une désolation. Non seulement le metteur en scène a réalisé des chefs-d’œuvre – « Le juge et l’assassin », « Que la fête commence », « Coup de torchon »… – mais il possédait un réel génie, loin d’être donné à tout le monde : il parlait de cinéma… comme personne. On pouvait l’écouter des heures évoquer de vieux films en noir et blanc d’avant-guerre qu’il trouvait d’une rare modernité, les tics de tel producteur, les tocs de telle actrice, les trucs de tels techniciens. Une encyclopédie qui savait exprimer sa passion et qui savait la transmettre.
Concluons toutefois ce rendez-vous par des bonnes nouvelles. Il y en a… On pense à la fin du conflit social à la société MAEC après 9 jours de grève. Mais aussi au chantier entrepris par les services du Conseil départemental à Caniac-du-Causse, « afin de restaurer plusieurs dolines du massif de la Braunhie ». Sibelle m’interroge du regard. « Tu ne sais pas ce que c’est, hein, une doline ? » Bon, je ne vais pas faire le malin, jusqu’à une date récente, très récente même, je ne savais pas non plus.
Voici la définition donnée par le Conseil départemental : « Témoignages de l’activité agricole qui était pratiquée sur les causses, les dolines étaient les rares endroits où l’épaisseur du sol permettait de cultiver du chanvre, des céréales, du tabac, des pommes de terre. Ces parcelles étaient entourées d’un mur afin de les protéger des animaux. En automne et en hiver, on y parquait les brebis et les chèvres durant la nuit, pratique qui permettait une fumure du sol par les déjections des animaux. » Faudra que je place ce mot, un de ces jours, dans une partie de Scrabble. Ou dans un poème. Il pourrait commencer ainsi : « Dans le paysage qui dodeline, pas de colline, mais une doline que le vent du causse caresse et câline… »