Sibelle et l’affaire Champollion
Chaque samedi, l’actualité lotoise vue par Philippe Mellet et surtout par ses chats.
J’aurais pu m’en douter. Car ces derniers jours, on ne voit et on n’entend plus que cette expression dans les publicités. Alors évidemment, ma chère petite Sibelle a fini par me demander ce qu’était le Black Friday. J’ai débuté de manière pédagogique. « Cela vient des États-Unis, où le lendemain du jeudi de Thanksgiving, le dernier vendredi de novembre est un jour de soldes qui donne le coup d’envoi des achats de fin d’année… » Sauf que désormais, le Black Friday dure plusieurs jours pour ne pas dire plusieurs semaines. Sibelle a réfléchi un instant avant de conclure qu’il fallait toujours se méfier des modes venues d’Amérique. Elle se souvient en effet avoir été bruyamment extirpée de son sommeil fin octobre quand des enfants ont sonné à la porte, déguisés en sorcières ou autres petits monstres, et quémandant des bonbons. « Ah oui, c’est Halloween » avais-je expliqué à ma tigresse domestique…
En attendant le vendredi noir, fuyant ce consumérisme mondialisé, nous nous sommes consolés lors d’une balade en ville, à Cahors, en soirée, alors que le Pont Valentré s’habillait de bleu pour s’associer à la «Journée internationale des droits de l’enfant » et qu’ailleurs, les premières illuminations de Noël semblaient comme conjurer la loi du calendrier. Plus tôt dans l’après-midi, sur le causse et même plus loin, on avait ensemble photographié quelques pans boisés et feuillus aux couleurs flamboyantes, car l’automne est un nuancier qui n’en finit pas de surprendre tant le jaune, l’orange, le rouge et le brun y mettent du leur pour toujours nous surprendre.
Mais l’actualité, encore et toujours, nous rattrape, ses filets toujours plus serrés nous piègent et nous affolent. Sibelle sursaute en apprenant qu’un jeune homme de 20 ans avait écopé d’une amende de 100 euros mercredi en gare de Matabiau, à Toulouse, pour avoir donné 70 centimes (tout ce qui restait dans ses poches) à une mendiante. L’agent SNCF (appartenant à la police ferroviaire) y aurait vu une incitation à enfreindre les « sollicitations de toute nature ». Face au « bad buzz » provoqué, la SNCF a décidé de déjuger son employé. Le jeune homme trop humaniste sera remboursé de son billet de 100 euros. « Les usagers sont très souvent sollicités au sein de la gare et cela crée un sentiment d’insécurité . On fait beaucoup d’annonces pour demander aux passagers de ne pas encourager la mendicité » explique cependant la direction.
Quid alors ma belle Sibelle ? Comment trouver un peu de quoi sourire, quand même. Pour garder une once de moral. Attendez, je cherche un peu, je trie dans les dépêches. Ah, voilà une affaire sérieuse. Voilà du pain sur la planche. Du grain à moudre pour les Albert Londres d’Occitanie, les Joseph Pulitzer du Quercy : on apprend que tout Figeac est en émoi. Il paraît que la municipalité songe à débaptiser le « Musée Champollion – Les Ecritures du Monde » pour le renommer « Musée des Écritures du Monde – Maison Champollion ». Avec Sibelle, on va faire étape à Saint-Cirq Lapopie avant de se rendre sur les lieux du drame. Dans les archives de la maison André Breton, il existe peut-être déjà une traduction, ou en tout cas une formulation du mot « surréalisme » en hiéroglyphes.