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Pas de confinement pour Sibelle


Chaque samedi, l’actualité lotoise vue par Philippe Mellet et surtout par ses chats.

La phrase est sortie toute seule, jeudi, alors que des rafales de vent balayaient la plaine et arasaient davantage encore les sommets du causse, le tout sous une pluie battante. « C’est ce qu’on appelle un temps de fin du monde… » Ces mots ont semblé pétrifier Sibelle. Ma protégée féline, plus hésitante au moment d’effectuer ses rondes dans le village quand la météo est vilaine, était déjà très contrariée. Elle venait – chose évidemment à proscrire ces jours derniers – de passer une demi-heure devant la télé, en l’occurrence, une chaîne d’info continue. Autant dire, un robinet d’images et de voix qui ne semblent jamais si bien jaillir que lorsque les nouvelles sont mauvaises. Il y avait été question d’un TGV qui avait déraillé en Alsace, de migrants désespérés, abandonnés à leur sort, à la dérive sur un canot et tentant de rejoindre je ne sais plus quelle île grecque, et bien sûr du désormais tristement fameux « Coronavirus COVID-19 ». Alors effectivement, dans ce contexte, évoquer « un temps de fin du monde » ne fit qu’aggraver le moral des troupes. En l’occurrence, celui de ma petite protégée féline. Je l’ai rassurée. Selon les experts, à ce jour, « il n’y a aucune preuve scientifique d’une transmission du coronavirus d’un chien ou d’un chat à un humain et vice versa ».

Je devine cependant ce qui effraie Sibelle. Tomber malade est toujours préoccupant, mais ce sont les méthodes et protocoles préventifs qui lui semblent encore plus alarmants, et tout simplement anxiogènes. « Tu m’imagines, moi, pauvre petite tigresse domestique, obligée d’être confinée ? Placée en quatorzaine ? » Alors, histoire de ne pas sombrer dans la paranoïa, nous avons continué à discuter, réfugiés derrière la fenêtre qui donne sur les prairies, au loin, où se formaient déjà quelques flaques. Nous avons convenu que nous ne saisissions pas toujours la logique des mesures annoncées par les autorités. Bien qu’adorant le football, nous ne comprenons pas forcément que l’on ait déjà annulé le salon du livre de Paris (prévu le 20 mars) alors que dans les stades, se pressaient encore cette semaine des dizaines de milliers de spectateurs pour assister à Lyon-PSG ou Saint-Etienne-Rennes. Sans parler des rames de métro dans la capitale ou dans les grandes métropoles. Toujours bondées.

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Les êtres humains sont de toute façon des êtres complexes. Il paraît ainsi que le fameux chef-d’œuvre d’Albert Camus, « La Peste », se vend comme des petits pains depuis le début de l’épidémie. Est-ce parce qu’on y lit cette réflexion qui a laissé Sibelle très pensive : « Le mal qui est dans le monde vient presque toujours de l’ignorance, et la bonne volonté peut faire autant de dégâts que la méchanceté si elle n’est pas éclairée. » Mais il est d’autres virus, comme celui de la politique. Celui-ci, il prolifère aussi dans notre département. Au sens noble du terme d’ailleurs, quand il s’agit de se préoccuper du bien commun et de la cité. Ainsi, on recense dans le Lot 5 211 candidatures en vue des municipales. Reste pourtant un mystère.

A Orniac (72 habitants), à Lauzès (189 habitants) et à Sabadèl-Lauzès (128 habitants), trois villages d’ailleurs très proches les uns des autres, personne ne s’est déclaré candidat. Le 15 mars, les mairies y resteront fermées. Lassitude des sortants, timidité des éventuels postulants ? Toujours est-il que s’il n’y pas davantage de bonnes volontés avant le second tour, le préfet désignera des administrateurs qui se chargeront des affaires courantes avant l’organisation de nouvelles élections. Que les habitants d’Orniac, de Lauzès et de Sabadel- Lauzès soient cependant rassurés. Ils ont peut-être échappé au pire. Sibelle m’a confié qu’elle regrettait de ne pas avoir au moins acheté une petite grange pour avoir le droit de se présenter dans un des trois villages. Elle aurait à coup sûr été élue. Et là, ce n’est plus de mesure de confinement ou d’affaires courantes dont il aurait été question. Mais d’une quatorzaine qui aurait duré six ans. Six ans de règne sans partage avec une seule et unique préoccupation : la satisfaction des caprices d’une féline qui sait toujours s’y prendre pour parvenir à ses fins (et apaiser ses faims).

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