La Plage aux Ptérosaures de Crayssac lève une énigme paléontologique vieille de deux siècles !
Trois nouvelles espèces d’empreintes sont à l’honneur.
La Plage aux Ptérosaures de Crayssac n’en finit pas de livrer des découvertes étonnantes. Une étude signée des paléontologues Jean-Michel Mazin et Joane Pouech vient de paraitre dans le journal scientifique international Geobios. Et à peine en ligne, la publication suscite déjà un grand nombre de réactions enthousiastes dans le monde de la paléontologie, certains n’hésitant pas à qualifier cette découverte de « Holy Grail » (Saint Graal) de la paléontologie. Quelle est donc cette découverte qui enthousiasme les spécialistes de dinosaures et autres ptérosaures ?
Voici 150 millions d’années, à la fin du Jurassique, alors que le Bassin Aquitain était envahi par une mer chaude et peu profonde, la région de Crayssac se trouvait au fond d’un golfe calme. Sur ce littoral s’étendait une immense vasière fréquentée à marée basse par de nombreux animaux : dinosaures, ptérosaures, tortues, crocodiliens, crustacés, etc. Tous ont laissé leurs traces dans la boue, aujourd’hui devenue ce calcaire exploité dans les carrières de la région. Et ce sont ces traces que les paléontologues mettent au jour lors de leurs fouilles annuelles.
Depuis plusieurs années, quelques traces de pas d’un petit animal énigmatique narguaient les paléontologues, qui avaient bien une idée, mais attendaient d’en trouver plus avant de publier leurs observations. Puis ce fut la découverte de plusieurs pistes, longues successions de petites traces de pas laissées par des animaux guère plus grands qu’un rat. Plus de 500 empreintes de pattes avant et arrière, bien conservées, au point de pouvoir compter les doigts et de reconstruire leur anatomie. L’étude révéla que les coupables étaient des ptérosaures de la lignée des « Rhamphorhynchoïdes », petits reptiles-volants primitifs aux grandes ailes tendues de peau. On n’avait jamais vu les empreintes de ces petits animaux dont on a, par ailleurs, retrouvé les squelettes fossilisés, si bien que depuis qu’on les connait, voici plus de 200 ans, les paléontologues se demandaient comment ils marchaient une fois au sol. A quatre pattes, sur deux pattes? Ou pas du tout, certains pensant qu’ils ne se posaient jamais au sol ou vivaient sur les falaises comme certains de nos oiseaux de mer.
Les chercheurs y ont identifié et nommé trois nouvelles espèces jusqu’alors inconnues. Ils ont baptisé la première Rhamphichnus crayssacensis ce qui signifie « l’empreinte de rhamphorhynchoïde de Crayssac » ; la deuxième a été nommée Rhamphichnus pereiraensis en l’honneur d’Antoine Pereira, l’ancien carrier-propriétaire, qui fit don de sa carrière pour la recherche ; la troisième Rhamphichnus lafaurii est dédiée à Gérard Lafaurie, qui découvrit ce site à la fin des années 1980.
Cela fait 25 ans que PaleoAquitania, association réunissant chercheurs et fouilleurs expérimentés, fouille dans cette carrière presque magique. Le site appartient aujourd’hui au Grand Cahors qui soutient les activités de recherche et le développement touristique. Unique en son genre, la carrière de Crayssac est également intégrée dans la Réserve Naturelle Nationale d’Intérêt Géologique du Lot riche de 58 autres points géologiques remarquables, dont les fameuses Phosphatières du sud du département. Rendez-vous donc aux prochaines découvertes et à la prochaine publication scientifique.
Photo@DR