Kira et le « land art »
Chaque samedi, l’actualité lotoise vue par Philippe Mellet et surtout par ses chats.
« Drôle de semaine, où l’on aura plus ou moins gaiement enjambé les ponts. Tant mieux évidemment pour celles et ceux qui purent en profiter. Mais quand on a des chats à la maison, un pont, c’est toujours trop loin (les internautes cinéphiles apprécieront…). On aura noté, à propos de pont, justement, que Jean-Pierre Pernaut et son équipe du 13 heures de TF1 cultivent un sens aigu de la diplomatie. Ainsi, lundi, put-on avec ma protégée Kira se régaler devant un reportage de plus de 3 minutes (c’est beaucoup, en télé) sur le magnifique Pont Valentré, emblème de notre ville-préfecture. « Je me demande s’il ne s’agit pas d’un lot de consolation » a murmuré Kira. «Comme pour adoucir le dépit des Lotois de voir le marché de Cahors se contenter de la 16ème place au concours du plus beau marché de France organisé par ce même journal de 13 heures… » Allez savoir.
J’ai jeté un coup d’œil sur le palmarès. C’est Sanary-sur-Mer qui a remporté le gros lot devant Royan et Saint-Pierre (La Réunion). N’ayant fréquenté aucun de ces marchés, je me garderai de tout commentaire. En revanche, j’ai observé que Troyes était 12ème, ce qui semble mérité (j’y ai naguère traîné mes guêtres et surtout mon panier). Que penser en revanche de la 10ème place de nos amis et voisins de Brive ? Fut-ce, pour les votants, un facétieux clin d’œil à la célèbre chanson de Georges Brassens ? Pour rappel, elle débutait ainsi :
« Au marché de Brive-la-Gaillarde
A propos de bottes d’oignons
Quelques douzaines de gaillardes
Se crêpaient un jour le chignon
A pied, à cheval, en voiture
Les gendarmes mal inspirés
Vinrent pour tenter l’aventure
D’interrompre l’échauffourée… »
Et pour rappel encore, la fin de l’histoire n’était pas très glorieuse pour les forces de l’ordre…
Là-dessus, ma tigresse domestique m’a soufflé que de Brassens à Brel, il n’y avait sinon qu’un pas, du moins, que quelques lettres. Une manière d’évoquer le projet téméraire porté par l’artiste Jacques Cohen de réaliser un portrait géant de l’auteur de l’inoubliable « Ne me quitte pas… » dans un champ, à Bélaye. La première phase est achevée, et il s’agit désormais d’attendre que le trèfle pousse pour que d’un poste situé à 100 m au-dessus du champ, le visage du Grand Jacques puisse être admiré. Une œuvre éphémère qui a provoqué quelque polémique, mais a reçu in fine le feu vert des autorités. Pour les non initiés, sachez que ce genre d’expérience se nomme le land art. En la circonstance, c’est un hommage destiné à saluer les 40 ans de la disparition du chanteur. Parfois, le land art est moins éphémère. Toujours est-il que cette discipline paraît d’une sagesse confinant à l’austérité à côté des installations d’art contemporain parfois visibles à Paris (on se souvient de ce monsieur enfermé avec des poules ou plus récemment d’une expo que ne purent admirer que des visiteurs nus comme des vers). « Mais dis donc » m’a interpellé Kira, « le land art, voici une piste à creuser pour le député Pradié, non ? ».
J’ai mis quelques secondes avant de comprendre. Ma féline faisait allusion à la récente nomination par le gouvernement du bouillant parlementaire LR du Lot pour diriger, avec un élu de l’Aveyron, une « mission nationale sur l’innovation et les nouvelles technologies dans les territoires ruraux ». Après tout, Kira a raison : quand on fait campagne en Méhari, le land art, cela peut être une affaire qui roule ! Mais que le député se garde des excès de vitesse. Mercredi, lors des questions au gouvernement, à un collègue LREM estimant « que le rail irrigue nos territoires, grâce à ses lignes de vie (…) », le virevoltant Aurélien Pradié a lancé : « Évitons la poésie ! ». Pour un admirateur de Georges Pompidou, c’est malvenu, non ? »