Kira et le charme anglais
Chaque samedi, l’actualité lotoise vue par Philippe Mellet et surtout par ses chats.
« Passé un certain âge, mon bon monsieur, il n’y a pas que certaines de vos illusions qui vous quittent. Vos idoles de jeunesse aussi. Lord Brett Sinclair alias Roger Moore en était. Je me souviens, gamin, à quel point j’étais fasciné par « Amicalement vôtre » dont chaque épisode, visionné sur la télé en noir et blanc, dans le salon familial, était un petit miracle d’humour, de classe, de suspense parfois, d’évasion toujours. La série n’a pas pris une ride. Moi, si. Cette semaine, pendant que Donald Trump s’exclamait que la Belgique était une très belle ville (sic) et que l’horreur terroriste frappait Manchester, une part de mon adolescence s’est donc enfuie. J’ai évoqué tout cela avec ma petite protégée féline, Kira. Sur la tablette numérique, je lui ai proposé aussi de regarder quelques extraits. Au bout du compte, elle n’a pas partagé mon enthousiasme mais je l’ai sentie pourtant contrariée. En tout cas perplexe. « C’est curieux, extrêmement curieux. Ce Sinclair, au volant de cette superbe Aston Martin, et son ami, ce Danny Wilde, qui conduit une berlinette Dino Ferrari, j’ai comme l’impression de les avoir déjà vus. En tout cas je les imagine parfaitement, descendant du château de Mercuès après un déjeuner en terrasse où ils auraient fait semblant de ne pas remarquer qu’une ravissante créature au service du KGB avait glissé un micro espion sous leur table. Je les imagine encore, un samedi matin, bousculant la foule sur le marché de Cahors, courant après un malandrin leur ayant dérobé des documents ultra-secrets et qui tout à coup s’engouffrerait dans la cathédrale… » J’ai souri. Kira n’avait pas tort, comme d’habitude, comme toujours même.
Il y avait effectivement chez Roger Moore ce petit quelque chose en plus, so british, so deliciously british, qui faisait son caractère unique dans le monde du cinéma et de la télé. Et comme Kira, maintenant que j’y pense, j’ai le sentiment que certains jours, dans les rues de Cahors ou dans les chais de je ne sais quelle grande maison viticole, on croise des résidents britanniques établis en Quercy ou des touristes que le Brexit n’a pas refroidis qui ont, définitivement, cette même élégance, ce même charme. Dommage. Aucun épisode du « Saint », d’« Amicalement vôtre », aucune scène de « James Bond » n’ont été tournés ici. Dommage, vraiment. Sir Roger Moore y aurait été comme un poisson dans l’eau (du Lot). « Tout cela me donne cependant envie d’apprendre l’anglais. Désormais, j’écouterai la BBC avant de m’endormir » a promis Kira. Je vous tiendrai au courant. »