Kira et l’annonce de Monsieur Hollande
Chaque samedi, l’actualité lotoise vue par Philippe Mellet et surtout par ses chats.
« Jeudi soir. Avec sa grande sœur Abysse, ma petite protégée féline Kira s’assoit (ou plutôt se vautre langoureusement) auprès de moi, dans le canapé, pour regarder « 20 heures Foot » sur iTélé. Comme leur maître, elles aiment voir et entendre ces journalistes, chroniqueurs et écrivains (comme l’excellent Bernard Morlino) débattre avec humour et distance sur les exploits de Ronaldo (dites CR7 pour être branché, comme le fait Kira), les choix tactiques de Monsieur Emery (le coach du PSG), les saillies de ce bon Pascal Dupraz qui est au Téfécé ce que Bernadette est à Lourdes. Et puis. Et puis rien. Pas de « 20 heures Foot ». Mais une allocution présidentielle. François Hollande annonce d’une voix blanche qu’il ne se représentera pas. J’en délaisse mon verre de whisky, euh, non, de malbec, surpris, comme tout le monde. Ou presque. Y’a toujours dans ces cas-là des experts revenus de tout qui… reviennent sur les plateaux vous glisser qu’ils s’en doutaient. Je me retourne. Et j’observe que Kira comme Abysse sont restées de marbre. Je les apostrophe : « Vous dormiez ? Vous ne dites rien ? » Alors, en chœur, elles me répondent avec la mine hautaine qu’ont les chats et les chattes dans ce genre de circonstances : « On ne veut pas jouer les experts revenus de tout, mais franchement, on le savait depuis longtemps. Depuis le 5 avril très précisément… »
Je me lève, je tourne en rond, je réfléchis, et je finis par comprendre. Le 5 avril au soir, dans le journal de David Pujadas, avait été diffusé un reportage de de Jeff Wittenberg, qui était « descendu » à Cahors pour répondre à cette question : « François Hollande peut-il rebondir ? Le chef de l’Etat a-t-il perdu son crédit ? Voici l’exemple de la ville de Cahors qui lui avait apporté un soutien massif en 2012… » Au gré des rencontres, dans une ville qui avait voté à 65 % François Hollande quatre ans plus tôt, les réponses avaient été globalement amères. « Il a désormais une image de looser »… « Trop de promesses n’ont pas été tenues »… « Pas assez de mesures pour combattre le chômage des quadras »… Et si une militante PS avait esquissé un parallèle avec le rugby « où il faut pousser jusqu’au bout, tant que le match n’est pas fini », même le maire Jean-Marc Vayssouze avait prudemment évité de répondre que François Hollande serait le meilleur candidat pour 2017.
« Ce soir-là, on a compris que c’était plié. Que Monsieur Hollande n’avait pas d’espace pour se présenter, et a fortiori pour gagner, ne serait-ce qu’un trou de souris (et on s’y connaît)… » ont expliqué mes politologues domestiques. Et Kira d’enfoncer le clou : « Quand on est devenu impopulaire à Cahors, on ne peut plus méditer que la phrase de Gambetta, la célébrité locale… » Quoi ? Vous aussi vous vous demandez de quelle phrase il s’agit ? De celle-ci, bien sûr : « Il faudra que la conséquence s’incline devant la cause. » Sur ce, Abysse et Kira sont déjà passées à autre chose. On annonce le premier marché aux truffes à Lalbenque la semaine prochaine.