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Figeac : La justice appelée à trancher dans le dossier du Surgié

Le tribunal de Toulouse a été saisi en référé par des opposants au projet de « renaturation ».

Il y a au moins une constante dans la longue histoire du site du Surgié, ce lieu-dit à l’est de Figeac, sur les rives du Célé : de longue date, on aime à y pêcher, voire à s’y rafraîchir en été dans un environnement bucolique à souhait. On lisait ainsi dans le Journal du Lot, édition du 27 juillet 1924 : « M. le maire de Figeac vient de prendre un arrêté interdisant la baignade dans la rivière du Célé, dans la partie comprise entre le moulin du Surgié et le moulin de Laporte. Cette mesure a été prise du fait que la tenue des baigneurs était parfois indécente et que certains d’entre eux profitaient de la baignade pour marauder dans les jardins en bordure de la rivière. »

Reste que le temps n’est plus aux galéjades. Et c’est désormais la justice qui est saisie pour statuer sur l’opportunité _ ou pas _ de stopper les travaux qui ont récemment débuté. Un chantier qui commence par la destruction du barrage réalisé en 1985 pour créer une retenue en amont de la ville, jouxtant une base de loisirs. Mais l’ouvrage s’est très vite avéré défaillant avant de mal vieillir. Et en 2017, le préfet du Lot a enjoint la collectivité à procéder à des travaux.

Sur ce constat, tout le monde est alors d’accord. Mais c’est la nature même des travaux à effectuer et le projet in fine retenu (il y avait plusieurs options sur la table) qui ont par la suite provoqué des incompréhensions. Et des oppositions. Car il ne s’agit pas seulement de repenser le cours du Célé avant qu’il ne traverse la ville… Les travaux concernent aussi la réalisation d’une nouvelle prise de captage de la station d’eau potable de Prentegarde, en rive droite. Ils induisent l’arrêt du fonctionnement du moulin du Surgié (en aval du site et de la réserve qui l’alimentait), moulin qui n’était plus que pédagogique et, qui, racheté, sera transformé en musée et enfin, évidemment, la transformation du plan d’eau gagné par des cyanobactéries en zone de biodiversité… Et, lors des crues éventuelles, l’espace pourrait être inondé, protégeant de facto la ville en aval.

Tel est très synthétiquement _ on passe sur les aménagements annexes à vocation ludique ou simplement paysagère et les nouveaux cheminements _ le dossier qui a été retenu par la ville, le maître d’ouvrage (syndicat mixte Célé Lot médian) et les partenaires appelés à subventionner les travaux (Etat , Agence de l’Eau, Région etc.). Pour un coût de près de 9 millions d’euros.

Oui mais voilà. Ces choix ont été accueillis avec étonnement par certains acteurs ou observateurs. Sur le fond comme sur la forme. C’est le cas de Daniel Paget, un ancien ingénieur qui a fait carrière à EDF, hydrologue de formation, et par ailleurs ancien maire de Camburat. Il rédige l’essentiel des articles liés au chantier du Surgié sur un site indépendant, « L’Écho des Citoyens ».  « Nous avons été abasourdis par l’absence d’enquête publique pour un projet d’une telle ampleur… et d’un tel coût. Nous avons donc avant l’été formulé un recours gracieux auprès du préfet de Région puisque c’est la DREAL (Direction régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement) qui est à l’origine de cette dispense. Le préfet avait deux mois pour nous répondre, ce qu’il a fait, ne déjugeant pas ses services. Cela est incompréhensible tant, à l’évidence, ces travaux vont avoir un impact environnemental » explique Daniel Paget. Dès lors, avec d’autres opposants, associatifs ou particuliers, il a été décidé de monter d’un cran. Fallait-il que soit enregistré un acte pouvant être contesté juridiquement. Or, le 22 juillet, fut signé le permis d’aménager par le maire de Figeac. C’est ce permis qui fait l’objet d’un « référé suspension » auprès du tribunal judiciaire de Toulouse. L’audience est fixée au mardi 23 septembre. Sont notamment parties civiles l’association nationale Hydrauxois (qui agit pour la promotion du patrimoine de l’énergie et de l’environnement des rivières) et l’association des Moulins du Quercy. La décision suivra rapidement, puisqu’il s‘agit d’un référé. « Nous espérons une suspension et la nomination d’experts judiciaires… Même si le chantier a débuté, je pense qu’il ne sera pas trop tard. Autant évidemment il me paraît indispensable de revoir l’actuel barrage, autant le projet retenu présente trop de dangers. En cas de forte crue, le centre-ville et ses ponts seront menacés. Il serait raisonnable de conserver un plan d’eau quitte bien sûr à prévoir des aménagements pour une meilleure circulation de l’eau entre rivière et réserve, ce qui empêcherait le développement de bactéries… Ce n’est pas un hasard si des ouvrages ont été édifiés à ce niveau depuis le Moyen Age ! »

La mairie, elle, se félicite pour sa part que les travaux aient enfin débuté. Le scénario retenu est d’autant plus pertinent à ses yeux qu’il est largement subventionné (80%) et que le reste à charge pour la collectivité (environ 700 000 euros) est déjà en partie assuré par des coups de pouce non négligeables de la Fondation du patrimoine et Open Rivers, une organisation néerlandaise qui a pour vocation précisément d‘aider à la « restauration des rivières européennes face à la prolifération des barrages » ! Et la mairie affiche donc une résolution tranquille : dans un communiqué, l’exécutif local répète que « la suppression du barrage ne constitue en aucun cas un facteur aggravant du risque d’inondation. Au contraire, cette opération vise à restaurer le lit naturel du Célé, améliorant ainsi l’écoulement de l’eau et réduisant les risques de débordement en aval immédiat. Cette démarche de renaturation s’inscrit dans les recommandations des services de l’État et des experts en hydrologie. Le réaménagement du Surgié est un projet d’intérêt général. Pour le mener à bien, la Ville et le Syndicat mixte se sont appuyés sur des études scientifiques menées par des bureaux d’études expérimentés, validées par des organismes spécialistes de l’environnement. Tous se sont accordés pour dire que le projet de renaturation, avec effacement du barrage qui menace de s’effondrer et valorisation de l’espace naturel dans sa globalité, était la solution la plus durable, la moins coûteuse et présentant le plus de bénéfices pour tous les Figeacois. »

Ph.M.

Photo : vue du site du Surgié après travaux. Ville de Figeac – Euré-k.

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