Danakil à Ecaussystème : « Il y a un lien particulier entre notre musique et notre public »
Le groupe sera sur la scène du festival ce dimanche. Entretien avec son chanteur, Bakil.
Alors qu’il se prépare à monter sur la scène d’Ecaussystème ce dimanche 27 juillet, le chanteur du groupe de reggae Danakil, Balik, nous parle de leur dernier album, de leurs choix artistiques et du lien si particulier qui les unit à leur public depuis plus de vingt ans.
> Medialot : votre album Demain peut-être revient à un reggae très organique, avec une écriture plus introspective. Dans quel état d’esprit étiez-vous au moment de l’écriture ?
Balik : c’est un album plus personnel, plus introspectif que les précédents. Dans les albums d’avant, on a fait beaucoup de recherches sonores, en utilisant notamment des programmations électroniques. Là, c’est plus épuré, plus joué. Je ne sais pas si j’ai une intention précise en démarrant un album. Je me laisse porter par la vague du moment, par l’état d’âme. Il y a des périodes où l’on est plus dans une réflexion sociale, d’autres où c’est plus intime. Là, c’est un album qui parle davantage de moi, même si ce n’est pas uniquement ça.
> M. : vous alternez entre engagement politique et introspection. Comment trouvez-vous un équilibre entre les deux sur un album ?
B. : je ne cherche pas à faire une ligne directrice. Les chansons naissent une par une, selon ce que j’ai envie d’exprimer. La cohérence d’un album, elle vient plutôt de l’arrangement musical. On veille à garder une homogénéité sonore. Je peux passer d’une chanson sociale à une chanson d’amour, ou très personnelle, sans que cela nuise à l’ensemble. C’est comme une discussion : on peut aller dans plusieurs directions tant qu’il y a une forme de cohésion.
> M. : pourquoi ce retour aux instruments joués ?
B. : c’est surtout lié à notre outil de production. On a notre propre studio depuis deux albums, ce qui nous donne plus de temps pour travailler, faire des maquettes, prendre du recul. On peut tester, revenir, affiner. Ce confort technique nous permet d’aller plus vers des sons organiques, joués en live.
> M. : votre public est aujourd’hui très diversifié. Comment expliquez-vous ce succès durable ?
B. : je pense que le fait de chanter en français joue beaucoup. Et puis, il y a un lien particulier entre le public et notre musique. On n’est pas passé par les canaux médiatiques classiques. Les gens viennent par eux-mêmes, ou par bouche-à-oreille, souvent dans un cadre familial. Aujourd’hui, on voit des adultes qui venaient nous voir adolescents et qui reviennent avec leurs enfants. Il y a des familles entières dans nos concerts, parfois trois générations. C’est assez touchant.
> M. : vous parlez d’un reggae « marginalisé médiatiquement ». Vous pouvez préciser ?
B. : oui, c’est un style très peu diffusé sur les radios grand public ou les télés. On ne voit quasiment jamais de reggae dans les grandes émissions. Pourtant, c’est une musique qui rassemble beaucoup de monde. Il y a des festivals qui réunissent 15 à 20 000 personnes par soir, des tournées en Zénith. C’est une culture vivante, avec une vraie audience. Mais comme beaucoup de groupes sont indépendants, hors majors, ils n’ont pas accès aux mêmes circuits de diffusion. Ce qui renforce d’ailleurs ce lien spécial avec le public : ceux qui viennent à nos concerts sont venus par choix, pas parce qu’ils nous ont entendus à la radio.
> M. : après plus de vingt ans de carrière, comment faites-vous pour ne pas vous répéter ?
B. : on prend le temps. On ne sort pas d’album tous les ans. Nos chansons suivent le cours de nos vies. Ce qu’on écrivait entre 18 et 25 ans n’a rien à voir avec ce qu’on écrit aujourd’hui. On parle de ce qu’on vit, de ce qu’on ressent. Et la musique, elle évolue aussi. La manière de travailler a changé : on s’envoie des fichiers, on répète différemment. Ça nourrit l’envie et renouvelle les idées.
> M. : votre histoire collective, votre amitié, a-t-elle nourri le parcours du groupe ?
B. : évidemment. On s’est connus avant même de faire de la musique, au lycée. On a grandi ensemble, construit ce projet ensemble. À chaque étape franchie, ça nous a soudés. Et ça se reflète dans les albums, où il y a souvent une chanson qui parle du collectif. C’est une aventure humaine avant tout.
>M. : vous revenez cette année à Écaussystème. Que pouvez-vous promettre au public ?
B. : on a un super souvenir de notre dernier passage ! Cette année, on va partager des titres du nouvel album, et faire en sorte que les gens passent un bon moment. On va chanter, danser, créer ce moment collectif. C’est ça l’essentiel.

