Emmanuel Pélaprat, à la recherche des partitions oubliées
Emmanuel Pélaprat, résidant dans le Lot, enseignant à l’Université de Bordeaux, titulaire de cinq premiers prix au Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris, a de multiples talents : pianiste, claveciniste, organiste titulaire du grand orgue Eugène Puget de l’église Notre-Dame du Taur à Toulouse. Il a aussi la passion de rechercher et de faire redécouvrir les partitions oubliées de compositeurs français de la fin du XIXème siècle. Rencontre.
Medialot : d’où vous vient cette passion des partitions inconnues ?
Emmanuel Pélaprat : de mon point de vue quand on est musicien il faut être curieux. Je conduis mes recherches dans les bibliothèques et principalement la Bibliothèque Nationale de France, auprès de marchands ou de sites internet spécialisés. La numérisation des partitions a considérablement augmenté les possibilités de recherche et donc de découverte.
M. : les œuvres françaises de la fin du XIXème siècle semblent vous intéresser plus particulièrement…
E. P. : nous sommes nombreux à considérer que la période qui se situe entre 1860 et 1920 constitue un véritable âge d’or pour la musique française, où apparaissent de nombreux compositeurs talentueux, d’une grande créativité dont Franck, Fauré ou Ravel sont parmi les plus connus. Certains, hélas, sont tombés dans l’oubli par effet de mode ou non publiés en leur temps. C’est le cas notamment des compositeurs Kunc ou Godard par exemple que je m’emploie à faire redécouvrir.
M. : vous allez permettre aux Lotois d’entendre début octobre, grâce au chœur départemental du Lot dirigé par Fanny Bennet, la messe de Clémence de Grandval. Pourquoi cette œuvre vous a-t-elle intéressé ?
E. P. : cette messe, découverte en vente sur internet, a attiré mon attention à double titre : elle est écrite pour chœur, piano et harmonium de salon, mode d’accompagnement rare pour l’époque, inspiré par la Petite Messe solennelle de Rossini, et c’est de la très belle musique, originale, alliant puissance et sensibilité. Clémence de Grandval était une compositrice reconnue en son temps, élève de Camille Saint-Saëns qui disait de ses compositions « qu’elles seraient certainement célèbres si leur auteur n’avait le tort, irrémédiable auprès de bien des gens, d’être femme ». Créée en 1867, cette messe a eu un succès retentissant et a été jouée régulièrement jusqu’en 1907 date de sa mort. Cette production aura donc une triple singularité: elle mettra une compositrice française à l’honneur, elle permettra d’entendre une œuvre originale qui n’est plus jouée depuis 100 ans et elle permettra d’entendre jouer un harmonium d’art, datant de 1897, fabriqué par Mustel, qui est à l’harmonium ce que Stradivarius est au violon.
M. : quelques mots sur votre passion pour l’harmonium d’art.
E. P. : c’est un instrument français du XIXème siècle magnifique, incroyablement complexe dans sa construction technique et aux possibilités de jeux, de nuances et de sonorités infinies. Il a conservé une mauvaise image car on l’apparente à tort aux harmoniums de nos églises de campagne, souvent mal entretenus et mal joués. Peu de musiciens le connaissent bien. Je me bats pour que le monde de la musique lui redonne la place qu’il avait à l’époque : celui d’un véritable orchestre de salon.
> La messe de Clémence de Grandval pour Soprano, mezzo-soprano, ténor soli, Chœur, piano et harmonium sera donnée par le Chœur départemental du Lot dépendant de l’ADDA les 7 octobre à l’Usine à Saint Céré , le 8 octobre à l’Espace Appia à Anglars-Juillac et le 9 octobre à l’auditorium du Grand Cahors.
Infos ADDA du Lot : 05 65 20 60 30