Sibelle, les barbecues de Rémi Branco et les 18 ans du petit prince du Danemark
Chaque samedi, l’actualité lotoise vue par Philippe Mellet et surtout par ses chats.
Lundi._ Au cœur de l’été, Rémi Branco fait sensation en accordant un entretien à Libération. Dans un dossier consacré aux difficultés de la gauche à se faire entendre dans et par la France des campagnes, le vice-président socialiste du Département déclare : « Les gens ne trouvent plus d’intérêt à voter pour nous. La gauche est vue comme une donneuse de leçons, qui depuis les métropoles leur explique comment il faut manger, s’habiller, se loger. Le discours de Sandrine Rousseau est pris comme une attaque. » Et comme l’avait fait le leader du PCF Fabien Roussel, il reprend l’exemple du barbecue qu’avait dénoncé Madame Rousseau : « Dans nos campagnes, on sort le barbecue, on invite les potes et on ouvre des bières parce que ça coûte trop cher d’aller au restaurant. » Rémi Branco évoque des combats plus urgents : les déserts médicaux, la difficulté à recruter dans certains secteurs d’activité, le maintien des services publics, le transport, l’accès à la propriété. Paradoxalement (ou pas?), le plaidoyer de celui qu’Aurélien Pradié avait nettement battu aux législatives de juin 2022 est bien accueilli à Paris. En tout par des élus ou des personnalités qui n’ont jamais digéré l’accord électoral conclu par le PS avec LFI et d’autres au sein de la NUPES. L’effet médiatique de l’élu lotois est réussi mais de courte durée. Un autre Branco, prénommé Juan, avocat classé très très à gauche, arrêté au Sénégal, est finalement libéré et rentre à Roissy où l’attendent les caméras. Sibelle est dubitative : « Il y a du vrai dans l’analyse de Rémi Branco. Mais ce qu’il dit est aussi valable pour la droite. Hors Monsieur Pradié, dans les autres scrutins, elle est marginalisée. Ou elle est absente. Quant à la gauche elle-même, qui ne se résume pas à Sandrine Rousseau et Jean-Luc Mélenchon, si elle n’avait pas été divisée, elle aurait raflé la mise dans l’autre circonscription aux législatives. Elle détient la plupart des cantons, les villes, et elle a fait fort aux régionales. Rien n’est simple. » Et ma protégée de conclure : « Je n’aurais jamais imaginé que le barbecue deviendrait un symbole politique aussi fort dans notre pays. » Demain, côtelettes ou merguez ?
Mardi._ Il ne manquait plus que ça. J’apprends dès le réveil à la radio que ce mardi 8 août est la « Journée internationale du chat ». Au petit-déjeuner, je me garde bien d’aborder le sujet. J’observe Sibelle : évidemment, elle fait comme si de rien n’était. Tu parles ! Comment croire que cette tigresse n’ait pas entendu les infos ? Sur ce je pars vaquer à mes occupations. Et Sibelle aux siennes, c’est-à-dire une promenade dans notre modeste jardinet, sur le haut du vieux village, et une sorte de sieste matinale sur le muret du bolet d’où l’on peut observer les allées et venues dans la rue. Arrive l’heure du déjeuner. C’est plus fort que moi. J’interpelle ma protégée : « Tu as prévu quelque chose de spécial ? » Pas de réponse. J’insiste. « Eh bien mademoiselle, c’est le 8 août ! » Alors Sibelle se lève et marche lentement vers la cuisine. Puis me toise… et enfin me répond : « Il ne t’a pas échappé que la Journée internationale du chat survient quatre jours seulement après l’anniversaire de l’Abolition des privilèges. Dans ce contexte, tu comprendras que je souhaite la jouer modeste. Rien de spécial aujourd’hui. Enfin si. Je ne fais rien. » Pas même inviter des potes et ouvrir des bières ? La France rurale vue par Rémi Branco n’a pas encore gagné le vieux village vu par Sibelle !
Mercredi._ La piscine d’été de l’Archipel doit fermer quelques jours. Il a fallu procéder à une désinfection. Dès ce week-end, petits et grands vont pouvoir de nouveau profiter des lieux. Je me souviens de la première fois où j’ai découvert cet Archipel pas comme les autres. C’était il y a une vingtaine d’années. Mes enfants étaient encore… des enfants. C’était au temps où l’on venait encore dans le Lot en touristes. On a cherché un coin pour étaler nos serviettes. On a enchaîné les tours de toboggans. On a ri comme des baleines. On a pris quelques coups de soleil. On était heureux. Deux heures plus tard, au moment de replier les serviettes et regagner notre gîte, les enfants ont protesté. « Déjà ? On pourra revenir ? Demain ? » Qu’ils soient d’ici ou d’ailleurs, les enfants ont toujours raison. Ils aiment les plaisirs simples. Avec ou sans barbecue.
Jeudi._ Le poids des mots, le choc des photos. Paris Match nous apprend qu’« en prélude des 18 ans du prince Christian de Danemark, en octobre prochain, la Cour a dévoilé trois nouveaux portraits du petit-fils de la reine Margrethe II, deuxième dans l’ordre de succession. » Sibelle soupire. Elle imagine que ce genre d’opération de communication aurait vraisemblablement plongé son grand-père, le Lotois Henri de Monpezat, dans un abîme de perplexité. « Et surtout, je constate que le prince, sur les photos, ne porte pas de cravate… » ajoute ma protégée que je ne devinais pas si « à cheval » sur l’étiquette. Et puisque c’est décidément le thème du jour, notons que Paris Match ne précise pas si parmi les différentes cérémonies prévues pour marquer l’événement, un barbecue a été prévu au château de Cayx. Si tel est le cas, gageons qu’on y ouvrira plus de malbec léger et fruité que de bières. Ou alors, c’est à désespérer de tout.
Vendredi._ C’est le week-end de la reprise pour le championnat de France de football. Au même moment, l’équipe de France féminine tente de continuer son parcours en coupe du monde. Et le monde de l’ovalie, lui, attend la coupe du monde rugby en France dans quelques semaines. Il paraît déjà loin, le tour de France cycliste. Les jours ne font que 24 heures et les semaines font 7 jours en toute saison. Mais avec Sibelle, on voudrait parfois que le calendrier ralentisse. Que les barbecues se prolongent par des siestes interminables. Et puisque l’on arrive au bout de cette chronique, il nous faut avec ma belle lâcher le morceau. Il y a bien quelque chose qui nous a choqués dans l’entretien accordé par Rémi Branco à Libération. Pourquoi n’a-t-il pas cité l’immense Maurice Faure et sa célèbre maxime ? « Dans le Lot, nous sommes pauvres, mais nous sommes beaux… »
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