Sibelle, le job dating de l’Education nationale et le voyage au Danemark
Chaque samedi, l’actualité lotoise vue par Philippe Mellet et surtout par ses chats.
S’il n’y avait l’été qui nous tend ses rayons de soleil en ce début du mois de juillet, s’il n’y avait ces promesses de balades le long du Célé, les pieds dans l’eau et l’esprit apaisé, s’il n’y avait ces apéros à venir, en famille et entre amis, qui s’éternisent, le soir, entre éclats de rire et digressions hasardeuses, s’il n’y avait ces festivals qui vont se succéder, ces fêtes de village, ces siestes aussi, à l’ombre d’un arbre isolé sur le causse. S’il n’y avait la nostalgie des départs en vacances d’antan, des bouchons sur la RN 20, des blagues des enfants sur la banquette arrière, s’il n’y avait tout cela et bien d’autres choses encore, on dirait presque que les élections passées, c’est l’heure du retour à la normale. Mais l’actualité n’est jamais monochrome.
On apprend ainsi qu’à son tour, l’Education nationale est obligée d’organiser dans le Lot un « job dating » (le 12 juillet) afin de recruter en urgence des enseignants et des administratifs. Alors que des parents d’élèves se mobilisent ici ou là contre des fermetures de classes, ces contractuels devront s’improviser hussards d’une république dont l’école est en crise. Les démissions se multiplient, les vocations se tarissent. Au pays de Gambetta aussi, il n’y a donc pas que les déserts médicaux que l’on craint. Et on a beau dire qu’être instit’ ou prof à Cahors, en Bouriane ou dans le Ségala, ce n’est pas tout-à-fait la même chose qu’à Bobigny ou dans le centre d’une grande ville où le loyer du moindre deux-pièces est affiché au tiers voire à la moitié de votre traitement, cela ne suffit pas…
D’ailleurs, puisqu’on évoque le coût de la vie, là encore, le Lot n’échappe pas à la morosité et à la grogne qui gagnent du terrain. A Figeac, une deuxième semaine de grève s’achève chez Ratier. Si le secteur aéronautique a retrouvé quelque vigueur après la crise sans précédent liée à la pandémie, les salariés estiment que leur feuille de paie était pour l’heure restée clouée au sol. On note au passage qu’une chaîne de télé nationale a évoqué le conflit en situant Figeac comme une localité « proche de Rodez ». Ce n’est pas complètement faux, mais il nous aurait semblé plus logique d’évoquer Cahors, qui est un tantinet moins éloignée. Comme quoi rien n’est simple en terme de marketing territorial…
Tiens, voilà ma protégée féline qui se penche pour observer l’écran. A ma grande surprise, et à mon grand soulagement, je n’ai pas besoin de perdre une demi-heure à lui expliquer qu’elle ne remplit pas tous les critères pour se rendre au « job dating » : elle a déjà assez à faire sans doute à surveiller, hors vacances, les allées et venues des écoliers qui passent devant la maison pour se rendre en classe, de l’autre côté du vieux bourg, ou qui en sortent, en riant et en criant. Non, Sibelle tient à ce que je mentionne quand même une bonne nouvelle : on a appris en effet que Rocamadour et Martel venaient de rejoindre le cercle des Plus Beaux Villages de France, un club dans lequel on n’entre pas comme dans un moulin, fût-il classé. Ces communes rejoignent six villages lotois déjà détenteurs du label : Saint-Cirq-Lapopie, Autoire, Cardaillac, Loubressac, Carennac et Capdenac-le-Haut. « Tant mieux pour eux, tant mieux pour le tourisme ! » se félicite ma tigresse. Qui me glisse ensuite : « Au fond, ce n’est pas si problématique que notre village ne fasse pas partie de cette élite. Je viens de lire les critères de sélection. L’un d’eux est : « Dimension de la trame viaire et diversité des cheminements ». Tu te rends compte ? Moi, je connais la moindre venelle, le moindre raccourci. Mais pas question que du jour au lendemain, des hordes de vacanciers m’emboîtent le pas dans le vieux bourg… »
En revanche, ma tigresse domestique aurait volontiers suivi ceux du président Rigal qui vient de se rendre au Danemark pour le départ du Tour de France. On sait les liens qui unissent le royaume et le département, et l’on sait aussi que la Grande Boucle fera étape deux jours en Quercy. Alors, à Copenhague, un stand a fait la promotion du Lot. La délégation, nous apprend un communiqué, a profité de l’occasion pour visiter « une recyclerie de quartier, très prisée des habitants de la capitale danoise, et une centrale à biomasse ». De quoi « alimenter le projet de mandat « Lot A Venir » pour « Construire le Lot à énergie positive avant 2050 » explique très sérieusement le même communiqué. Sibelle remarque que le vice-président du Conseil départemental en charge du tourisme, Christophe Proença, était du voyage. A défaut de siège au palais Bourbon, sans doute s’est-il consolé en allant admirer celui d’Amalienborg : il s’agit de la résidence d’hiver de la famille royale danoise. Elle se compose de quatre palais aux façades néo-classiques identiques et aux intérieurs de style rococo, apprend Sibelle sur Wikipédia. « Pour le style baroque, en revanche, on a déjà donné dans le Lot aux législatives » persifle mon insolente protégée.
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